Chronique de Septembre — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Chronique de Septembre

En ce temps-là...

Chronique de l'Abbaye de Tamié
Septembre 2006


A Antioche de Pisidie, les chefs de la synagogue demandèrent à Paul et à Barnabé : "Frères, si vous avez quelque parole d'encouragement à dire au peuple, parlez !" (Ac 13, 15)

Saint Benoît recommande dans sa Règle au chapitre 67 : Au retour d'un voyage personne ne se permettra de rapporter sans discernement à autrui ce qu'il aurait vu ou entendu hors du monastère, parce qu'il peut en résulter une ruine spirituelle.

Constitutions de l'Ordre n° 58 - La formation continue - Tout au long de leur vie les frères ont à s'instruire de la "philosophie du Christ". [...] La liturgie, les entretiens de l'abbé, les lectures et conférences contribuent à cette formation de toute la communauté.

Que dire dans une chronique
après de telles orientations ?







Père Abbé présente les grandes lignes de la rénovation de la liturgie à Tamié, de 1965 à 1985. La communauté n’envisageait pas au départ une évolution aussi rapide : la première concélébration eut lieu en décembre 1964, en juin 65 elle est devenue quotidienne. En 1968 Tamié est choisi avec 3 autres abbayes de l’Ordre en France pour restructurer l’office. Les Frères Jean-Marie, Aelred, Victor travaillent à en composer un en français ; la communauté est régulièrement informée et s’exprime lors de sondages. En 1966 un office de laudes pour Pâques est composé avec toute liberté puisque la liturgie romaine n’en prévoit point. En 1974, pour le centenaire de la mort de saint Pierre de Tarentaise, une dizaine de Frères proposent des pièces pour un office propre. P. Charles exécute une nouvelle châsse pour les reliques.

Samedi 9 : Les soeurs Ghislaine et Fidélie de Murhesa au Congo démocratique nous présentent leur communauté : 24 présentes, une dizaine ont fondé à Kibungo au Rwanda. Leur économie dépend de celle du pays, le Congo démocratique, c’est-à-dire à base d’expédients. Il fallait une demi-heure auparavant pour aller à Bukavu par la route asphaltée, maintenant un heure quand tout va bien, 30 mn de plus pendant la saison des pluies et parfois il y a des barrages par des groupes armées, des interamwes sont dans les parages. En 2004 le monastère s’est trouvé pris sous le feu de deux de ces groupes adverses… C’était moins grave qu’en 1996-97 où des sœurs ont réussi à s’échapper par une porte gardée par des militaires grassement payés, alors qu’elles étaient attendues à une autre pour être massacrées…

Mardi 12 : Fête de saint Pierre de Tarentaise, fondateur et premier abbé de Tamié - Film : Les clefs de la maison, de Gianni Amelio. Paolo, 15 ans, est handicapé et n’a jamais connu son père. Après la mort de sa mère lors de sa naissance, il a été recueilli et élevé par son oncle et sa tante. Chaque année, il doit se rendre à Berlin dans un hôpital spécialisé. Et cette année, pour la première fois, c’est son père qui va l’accompagner. Un film remarquable d’émotion et de délicatesse.
Le jardin produit merveilleusement et ne laisse pas beaucoup de temps à Fr. Ginepro pour avancer la réalisation du tabernacle pour l’oratoire de l’hôtellerie.
L'ancien autel de concélébration de l'église de Tamié, consacré en 1966, enlevé en janvier 1993 est donné à père Rémi Perrochon pour son ensemble paroissial Ste-Marie-Madeleine des vallées d'Aigueblanche dont le centre sera l'église (400 places) du Sacré-Coeur de La Léchère, ancien Foyer de Charité.

Mercredi 13 : Père Abbé nous présente des libres propos du Pape sur la liturgie. "Ars celebrandi : la celebratio est une prière et un dialogue avec Dieu : Dieu avec nous et nous avec Dieu. La première exigence pour une bonne célébration est donc que le prêtre entre réellement dans ce dialogue. En annonçant la Parole, il se sent lui-même en dialogue avec Dieu. Il écoute la Parole et annonce cette Parole, dans le sens où il devient un instrument du Seigneur et cherche à comprendre cette Parole de Dieu qui doit ensuite être transmise au Peuple. […] Saint Benoît, dans sa « Règle » dit aux moines : « Mens concordet voci » [conduisons-nous dans la psalmodie de manière que notre esprit concorde avec notre voix] (RB 19). La vox, les paroles, précèdent notre esprit. D'habitude, ce n'est pas comme cela : d'abord on doit penser, puis la pensée devient parole. Mais ici, la parole précède. La sainte Liturgie nous donne les paroles et nous, nous devons entrer dans ces paroles, trouver l'harmonie avec cette réalité qui nous précède. […] A côté de cela, nous devons également apprendre à comprendre la structure de la Liturgie […] et entrer ainsi avec notre mens dans la vox de l'Église. Dans la mesure où nous avons intériorisé cette structure, assimilé les paroles de la Liturgie, nous pouvons entrer dans cette harmonie intérieure et ainsi, non seulement parler avec Dieu comme des personnes individuelles, mais entrer dans le « nous » de l'Église qui prie. Et de cette façon, transformer également notre « moi » en entrant dans le « nous » de l'Église, en enrichissant, en élargissant ce « moi », en priant avec l'Église, avec les paroles de l'Église, en étant réellement en dialogue avec Dieu. […] Ainsi, notre célébration devient réellement une célébration « avec » l'Église : notre cœur s'élargit et nous ne faisons pas simplement quelque chose, mais nous sommes « avec » l'Église et en dialogue avec Dieu. Il me semble que les personnes savent percevoir si nous sommes véritablement en dialogue avec Dieu, avec elles ; ou si, au contraire, nous faisons uniquement quelque chose d'extérieur. L'élément fondamental du véritable ars celebrandi est donc cet accord, cette harmonie entre ce que nous disons avec nos lèvres et ce que nous pensons avec le cœur. […] L'ars celebrandi entend inviter à une intériorité qui se fait sentir et qui devient acceptable et évidente pour les personnes présentes dans l'assemblée. Ce n'est que si les personnes voient qu'il ne s'agit pas d'un ars extérieur, spectaculaire — nous ne sommes pas des acteurs ! — mais qu'il s'agit de l'expression du chemin de notre cœur qui attire également leur cœur, qu'alors la Liturgie devient belle, qu'elle devient une communion de toutes les personnes présentes avec le Seigneur. (Texte complet sur le site du Vatican)

Jeudi 14 : F. Gaël s'est rendu à un congrès intitulé « Monachisme et réforme liturgique » 40 ans après Vatican II, organisé par l'abbaye Monte Oliveto, en Toscane, du 11 au 13 septembre. Les quelque 60 moines et moniales, italiens et une dizaine de français participèrent aux offices dans les stalles de l'église abbatiale et bénéficièrent de l'enseignement de cinq liturgistes* de renom, 2 italiens, 3 français, des témoignages sur la réforme liturgique dans 4 monastères italiens et 3 français et de plusieurs temps d'échanges. De ces « bilans et perspectives » on retira deux questions pratiques méritant une réflexion théologique : celle de la fréquence de l'eucharistie dans nos monastères chez les moniales et chez les moines, et celle de la concélébration quand un corps sacerdotal trop important donne une image tronquée d'une assemblée chrétienne ordinaire, question de proportions.
*Andrea Grillo (saint Anselme de Rome), Giorgio Bonacorso (sainte Justine de Padoue), Paul de Clerck, directeur de la revue La Maison Dieu, dom Marie-Gérard Dubois, président de la CFC, dom Danier Saulnier, paléographe de Solesmes.

Dimanche 24 : Solennité de la dédicace de l'église de Tamié.
Les Petits Chanteurs à la Croix de Bois s’invitent pour l’eucharistie, une trentaine de jeunes ainsi que 35 anciens et leur épouse, à l’occasion du centenaire de leur fondation, l’idée de leur manécanterie ayant germé en 1906 dans une chambre de notre hôtellerie, la communauté n’y étant pour rien !
« Un jour de l’été 1906, deux jeunes parisiens passionnés de chant religieux devisaient dans une des chambres de l’hôtellerie. En ce temps, Pie X venait d’amorcer la réforme du chant liturgique, désirant que le peuple chrétien « prie sur de la beauté ». Tout d’un coup Pierre Martin saisit le poignet de son compagnon Paul Berthier : « Nous allons nous-mêmes fonder une maîtrise ! » lui dit-il. Les Petits Chanteurs à la Croix de Bois étaient nés. Vingt-cinq ans plus tard, Paul Berthier pouvait écrire : « Quel envol est parti de ces vieux murs blancs, de cette alcôve voûtée, de cette étroite fenêtre d’où l’on voit une merveilleuse vallée. » (Extrait de Histoire des moines de Tamié et de quelques autres ; Bruno-Jean Martin, 1982, p. 130)

Jeudi 28 : L'expérience monastique face aux défis de la culture actuelle – Citation de Jean-Yves Lacoste : « Le moine se présente comme celui qui vit la vie même, la vie telle qu'elle mérite d'être vécue par un homme [...] dans une logique d'anticipation. [...] Par le célibat il transcende dans sa chair la différence des sexes. [...] Son silence n'est pas mutisme, il rend à l'homme la qualité d'auditeur de la Parole divine. [...] L'obéissance destitue le cénobite d'une volonté propre et restitue le vouloir à un sens qui est son secret eschatologique. [...] La pauvreté rend le moine marginal et inquiétant, mais elle est une conduite kénotique, vécue à la suite d'un Dieu qui s'est fait pauvre. [...] La vie en communauté fraternelle vouée à la louange incessante est le plus pur signe eschatologique que recèle le projet monastique ; dans le cours des réalités provisoires, le moine y apparaît comme le témoin définitif de ce qui ne passera pas. La vie qui se veut intégralement liturgique est icône présente (et seule représentation possible) d'une éternité à la mesure de l'homme. La vie commune prouve que l'être de l'homme est un être pour la communion ». (Dictionnaire critique de Théologie, PUF, 1998, art. « Monachisme », p. 170.)

Père Abbé commente les constitutions de l’Ordre – N° 52 - La profession temporaire. Ce temps est important, la formation se poursuit pour que le jeune moine entre de plus en plus dans la connaissance du mystère du Christ et de l’Église ainsi que dans celle du patrimoine cistercien et qu’il s’efforce de les faire passer dans sa vie. La formation continue est proposée à chaque frère selon ses possibilités. Elle vise à permettre à chacun de se conduire selon des valeurs intériorisées.
N° 53 – La formation des profès à vœux temporaires – Eux-mêmes doivent intégrer progressivement de façon personnelle la vie monastique ; « la communauté peut se rendre compte si le profès intériorise les valeurs monastiques : prière, travail, vie fraternelle, obéissance. L’aptitude d’une communauté à former de nouveaux membres dépend pour une large part de son unité d’esprit, de sorte que puisse se transmettre aux nouvelles générations une orientation unique. »
N° 54 - Admission à la profession solennelle – Le profès présente librement sa demande au Père Abbé. Charte de la formation 45 - « L'Abbé examine avec les responsables les progrès spirituels et humains du jeune profès, c'est-à-dire s'il a une maturité humaine suffisante pour prendre un engagement libre et responsable qui lui permette de vivre sa consécration avec fidélité à travers les multiples difficultés et évolutions qui caractérisent le cheminement spirituel, et s'il accepte la communauté avec son identité propre et est disposé à la servir. »
N° 55 – La désappropriation des biens – Le frère par la profession solennelle perd la capacité d'acquérir des biens et d'en posséder.
N° 56 – La profession solennelle – Le frère se donne au Christ en esprit de foi et s'engage à vivre pour toujours dans sa communauté, selon la Règle de saint Benoît. L'abbé et les frères l'accueillent avec bienveillance dans la communauté, sachant qu'ils s'obligent au devoir de l'aider par leurs prières et leurs exemples à revêtir de plus en plus la ressemblance du Christ.

Fermeture de l'hôtellerie du 14 janvier au 5 février 2007.