Homélie - TO 18 — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie - TO 18

Par Frère Antoine
croix - arcabas
Homélie pour le 18ème dimanche
du temps ordinaire - C
Luc, 12, 1-13

(Simple schéma)

Lire l’évangile, soit individuellement soit en groupe, nous laisse souvent perplexes et secs devant un texte qui ne nous parle pas forcément dès la première lecture. Essayons une « grille de lecture » très simple, en deux questions :
- Qu’est-ce que ce texte m’apprend de Jésus et, par Lui, de Dieu ?
- Qu’est-ce que ce texte dit de notre humanité et donc de moi ?

Qu’est ce que ce texte m’apprend de Jésus ? Qu’il n’est pas aussi gentil et complaisant que je l’imaginais. Il refuse un service que ses compatriotes avaient l’habitude de demander aux « rabbis », capables de trancher des conflits comme autrefois Moïse. S’il était intervenu, peut-être les frères se seraient-ils réconciliés ? Cela m’apprend que Jésus n’est pas un « rabbi » comme les autres. Il n’est pas venu sur terre pour faire le notaire ou le juge de paix (professions très honorables et très utiles !) Il prend de la distance par rapport à nos problèmes concrets .Il dit : « Attention ! Gardez-vous de toute cupidité, ne vous trompez pas de richesse ». Le voilà dans son rôle : « Je suis venu pour que vous ayez la Vie. Ne vous trompez pas de vie. Celle-ci ne dépend pas de vos richesses ».

De Dieu Père ? Dans la parabole qu’il utilise, Jésus renvoie, comme souvent, à un personnage qu’il ajoute et auquel il réfère sa propre identité. Dieu intervient (ce qui est tout à fait exceptionnel dans une parabole) pour dire quoi ? « Insensé ». Comme un père peut dire à son fils : « Tu es fou » pour un projet sans avenir avec lequel il n’est pas d’accord. « Cette nuit on te demandera ta vie ». Notons bien, le « on » et non pas « je » te demanderai ta vie. La parabole s’arrête là, comme un avertissement, On ne sait pas si le lendemain on l’a retrouvé mort dans son lit.

L’Esprit ? Il en était question dans l’évangile de dimanche dernier (dernière phrase). Il y a une prière qui est toujours exaucée, celle qui demande l’aide de l’Esprit. Nous ne sommes pas abandonnés à nous-mêmes. L’Esprit nous donne la capacité de bien discerner ce qui est bon pour nous, c’est le don de conseil. Mais il ne fait pas notre travail à notre place. Il ne nous enlève pas notre liberté, au contraire, il suscite notre responsabilité dans les problèmes concrets de notre vie, comme peut l’être une dispute de famille pour un héritage. Il nous aide à mettre de l’ordre dans nos vies. Et ici, il parle par la bouche de Jésus en nous disant deux choses : « Gardez-vous de toute âpreté au gain » et « Enrichissez-vous en vue de Dieu ». Autrement dit : « À vous de décider de vos choix ! »

Qu’est-ce que ce passage d’évangile m’apprend de notre humanité, de moi ?

Ce que Jésus dit de l’homme tenté par la richesse vaut encore aujourd’hui. Très critique vis-à-vis de la richesse, Jésus nous met en garde contre ce faux dieu, cette idole séduisante et opposée au Royaume qu’il annonce : « Vous ne pouvez servir Dieu et l’argent » (Cf. le livre de Florence Aubenas Le quai de Ouistreham, : « Même des pauvres sociologiquement et économiquement ont une mentalité de riches et n’ont qu’un désir avoir une belle voiture neuve et les moyens de vivre dans le confort que propose notre société sans en donner les moyens »). Mais Jésus n’a pas non plus une attitude uniforme, ça dépend des gens qu’il rencontre. Aux uns, il demande de tout quitter, à d’autres il demande l’hospitalité comme à Marthe et Marie, bien content de trouver chez elle un lieu de repos au cours de ses tournées. À d’autres, , il ne demande pas de partager, Zachée en prend lui-même l’initiative.

Si je m’identifie à l’homme au milieu de la foule, le texte me renvoie, comme un miroir, l’image de quelqu’un qui s’approche de Jésus non pour l’écouter mais pour lui demander un service. Ainsi je peux venir ce matin à la messe, non pour écouter la parole de Dieu dans la liturgie de la Parole mais pour lui demander un dépannage. Pourquoi pas ? Mais je serai aussi renvoyé à ma responsabilité avec, en cadeau la force de l’Esprit. Si je m’identifie à l’homme de la parabole, l’image renvoyée n’est pas seulement d’être riche mais d’être en plein imaginaire : cet homme est seul, il se parle à lui-même et n’a d’autre idéal que de bien s’installer sur terre.

 

Conclusion : Suivre Jésus, c’est se distinguer de ce que st Jean appelle « le monde ». Un monde qui est beau, qui a ses richesses qui n’est pas que « vanité » puisque c’est dans la contingence de ce monde que nous accueillons la vie de Dieu, le Royaume. En venant à la messe ce matin, nous nous mettons à part pour venir écouter une parole qui nous rappelle l’importance de notre vie, de nos choix. Elle nous rappelle que nous sommes des citoyens du Ciel, des héritiers du Royaume.