Homélie TO 33 — Abbaye de Tamié

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Homélie TO 33

Par Frère Patrice

33ème dimanche du temps ordinaire - C

1ère lecture : « Pour vous, le Soleil de justice se lèvera » (Ml 3, 19-20a)
Lecture du livre du prophète Malachie
Voici que vient le jour du Seigneur, brûlant comme la fournaise. Tous les arrogants, tous ceux qui commettent l’impiété, seront de la paille. Le jour qui vient les consumera, – dit le Seigneur de l’univers –, il ne leur laissera ni racine ni branche. Mais pour vous qui craignez mon nom, le Soleil de justice se lèvera : il apportera la guérison dans son rayonnement.

Psaume : Ps 97 (98)

R/ Il vient, le Seigneur, gouverner les peuples avec droiture.

Jouez pour le Seigneur sur la cithare,
sur la cithare et tous les instruments ;
au son de la trompette et du cor,
acclamez votre roi, le Seigneur !

Que résonnent la mer et sa richesse,
le monde et tous ses habitants ;
que les fleuves battent des mains,
que les montagnes chantent leur joie.

Acclamez le Seigneur, car il vient
pour gouverner la terre,
pour gouverner le monde avec justice
et les peuples avec droiture !

2ème lecture : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus » (2 Th 3, 7-12
)Lecture de la deuxième lettre de saint Paul apôtre aux Thessaloniciens
Frères, Soeurs vous savez bien, vous, ce qu’il faut faire pour nous imiter. Nous n’avons pas vécu parmi vous de façon désordonnée ; et le pain que nous avons mangé, nous ne l’avons pas reçu gratuitement. Au contraire, dans la peine et la fatigue, nuit et jour, nous avons travaillé pour n’être à la charge d’aucun d’entre vous. Bien sûr, nous avons le droit d’être à charge, mais nous avons voulu être pour vous un modèle à imiter. Et quand nous étions chez vous, nous vous donnions cet ordre : si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus. Or, nous apprenons que certains d’entre vous mènent une vie déréglée, affairés sans rien faire. À ceux-là, nous adressons dans le Seigneur Jésus Christ cet ordre et cet appel : qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné.

 « C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie » (Lc 21, 5-19)
Alléluia. Alléluia. Redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. Alléluia.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, comme certains disciples de Jésus parlaient du Temple, des belles pierres et des exvotos qui le décoraient, Jésus leur déclara : « Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit. » Ils lui demandèrent : « Maître, quand cela arrivera-t-il ? Et quel sera le signe que cela est sur le point d’arriver ? » Jésus répondit : « Prenez garde de ne pas vous laisser égarer, car beaucoup viendront sous mon nom, et diront : ‘C’est moi’, ou encore : ‘Le moment est tout proche.’ Ne marchez pas derrière eux ! Quand vous entendrez parler de guerres et de désordres, ne soyez pas terrifiés : il faut que cela arrive d’abord, mais ce ne sera pas aussitôt la fin. » Alors Jésus ajouta : « On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume. Il y aura de grands tremblements de terre et, en divers lieux, des famines et des épidémies ; des phénomènes effrayants surviendront, et de grands signes venus du ciel.

 Mais avant tout cela, on portera la main sur vous et l’on vous persécutera ; on vous livrera aux synagogues et aux prisons, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs, à cause de mon nom. Cela vous amènera à rendre témoignage. Mettez-vous donc dans l’esprit que vous n’avez pas à vous préoccuper de votre défense. C’est moi qui vous donnerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer. Vous serez livrés même par vos parents, vos frères, votre famille et vos amis, et ils feront mettre à mort certains d’entre vous. Vous serez détestés de tous, à cause de mon nom. Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. »

© AELF - Paris 2013

Homélie

 

C’est la fin de l‘année liturgique année C, mais ce n’est pas la fin du monde quoique tous   les textes de la liturgie, les évènements de ces dernières années ou de ces derniers mois  puissent nous le laisser penser !
Mais tous les évènements difficiles sont souvent l’occasion qui nous est offerte de chercher à y voir clair et de nous positionner sur certains problèmes.
J’en vois deux !
Tout d’abord trois fois Jésus utilise cette expression « en mon nom » ! Si je vous dis que je viens de la part de Pierre ou de Paul, je pense que vous chercherez à savoir si c’est vrai en vous basant sur certains indices. Cela suppose que vous connaissiez bien la personne en question. Alors qu’est-ce que je connais vraiment de Jésus qui me permettre de juger si mon interlocuteur vient vraiment de la part de Jésus ou si c’est un imposteur. Et cela va même plus loin ! Quelle est ma relation profonde avec Jésus ? Et c’est souvent dans ces conditions extrêmes que se vérifie l’authenticité et la force du lien qui relie deux  personnes. Ai-je vraiment un lien tel avec Jésus ? Rappelez-vous St Pierre qui avait dit à Jésus qu’il le suivrait jusqu’au bout…et qui le renie par trois fois oubliant la parole qu’il avait donnée à Jésus. Il faut le chant du coq pour lui rappeler sa parole, mais surtout pour lui rappeler l’attachement qu’il lui avait affirmé, mais aussi pour l’amener à pleurer amèrement et à se rattacher de nouveau à son maître, et probablement beaucoup plus fortement !

Alors que veut dire Jésus quand il nous dit « prenez garde à ne pas vous laisser égarer » ? Il nous signifie d’abord que l’auto désignation ne suffit pas : ce n’est pas tout de dire « c’est moi » ; mais aussi que les prodiges peuvent être trompeurs : il ne suffit pas de faire (rappelez-vous dans le livre de l’Exode où les magiciens du Pharaon réalisaient les mêmes prodiges que Moïse). Non, ce qui compte c’est la parole entendue de la bouche même de Jésus. L’écoute attentive de sa parole mise en mémoire donne alors l’orientation fondamentale. En ce sens les paroles de Jésus ne sont pas tant des prédictions. Non elles veulent avant tout nous prévenir, démentir d’avance certaines allégations et surtout être comme des messages qui jalonnent notre chemin et nous guident lorsque nous sommes dans le doute ou l’hésitation; en un sens nous aider à tenir debout.

Mais tenir debout dans quel but, et pour rester immobile ou pour s’engager dans une direction ? Le dernier mot de notre évangile du jour nous donne le ton «  vous garderez votre vie ». Et ce mot de vie vient en contradiction avec tout ce passage d’évangile où il n’est question que de temple dévasté, de ruines, de guerres et de désordres, de persécution, de trahison , de mise à mort. Où est la vie dans tout cela, ou plutôt de quelle vie est-il question, et surtout quel sens je veux donner à ma vie C’est lui qui conditionnera mon comportement face à tous ces bouleversements.

Jésus veut nous prévenir : vous vivez dans un monde d’adversité, un monde où les autres n’acceptent pas ce que vous êtes ni ce que vous faites. Bref, un monde d’intolérance. Et une intolérance qui pousse ses partisans fanatiques à éliminer tout ce qui vient contredire leur prise de position ; mais qui entraîne aussi les esprits un peu faibles à avoir les mêmes comportements qu’eux, au risque de les voir traquer, dénoncer ou mettre à mort leurs proches.

C’est alors un appel que Jésus nous lance. Un appel à pénétrer au fond de nous-mêmes, à prendre conscience que Dieu est bien là au plus intime de nous-mêmes, au fond de notre âme. Et non seulement à prendre conscience qu’il est là, mais que c’est lui qui donne sens à toute notre vie, et que nous souhaitons vivre avec lui. J’oserai presque dire que Jésus nous appelle à avoir une âme en béton, de ce béton qui résiste à toutes les secousses sismiques qui mènent les hommes au chaos. Ce béton qui résiste aux dégradations du temps, qui donne à l’édifice qu’il construit de persévérer dans le temps, de rester en vie.

En fait, et si l’on voulait résumer tout ce que j’ai difficilement essayé de vous dire, j’emploierai une image peut-être un peu grande à vous yeux mais qui reflète pourtant la réalité, et que j’emprunte à St Augustin. « Nous n’avons pas seulement été faits chrétiens, nous avons été faits Christ », et pas seulement pour vivre en union avec Lui, mais pour porter aux autres la lumière et la présence du Christ. C’est le message des martyrs, mais c’est aussi et surtout l’inimaginable : Le Seigneur a besoin de nous, et nous sommes la seule chance de Dieu dans le monde d’aujourd’hui, afin qu’il ne sombre pas dans le chaos.