Homélie - Pentecôte — Abbaye de Tamié

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Homélie - Pentecôte

Par dom Victor
croix - arcabas
Fête de Pentecôte

Homélie


         Par trois lectures bien différentes la Parole de Dieu s’adresse à nous ce matin pour nous faire découvrir toute la richesse et la profondeur du Mystère de l’Esprit Saint. Cette page d’évangile tout d’abord que je viens de proclamer et qui peut surprendre car elle nous ramène au soir de Pâques. Saint Jean rattache ainsi le don de l’Esprit à la résurrection de Jésus. La liturgie fait de même en gardant allumé tout le jour le cierge de la vigile pascale. Il sera enlevé ce soir, marquant ainsi la fin du Temps pascal. Il répandit sur eux son souffle et leur dit : recevez l’Esprit Saint. C’est Jésus ressuscité qui nous donne son Esprit. Et ce don de l’Esprit est associé au pardon des péchés.

         La lecture des Actes des Apôtres nous est plus familière pour ce jour de Pentecôte. Les disciples sont réunis en prière avec quelques femmes dont Marie, la mère de Jésus. Le groupe des 12 a pris déjà une dimension plus universelle : ils étaient environ 120, nous dit saint Luc, c'est-à-dire 12 multiplié par 10. Soudain, vint du ciel un bruit pareil à celui d’un grand coup de vent et ils voient apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et se posait sur chacun. Notez la prudence des termes employés…Cette irruption de l’Esprit qui emplit la maison libère aussi la parole, chacun s’exprimant selon de don de l’Esprit. Telle est la première prédication de l’Évangile et tous entendent dans leur langue proclamer les merveilles de Dieu.

         La lettre de Paul aux chrétiens de Corinthe, lue en seconde lecture, est pour nous le témoin précieux des premières communautés chrétiennes dans le monde grec vers l’an 50. L’Esprit anime ces communautés par des dons divers et il les garde dans l’unité, car : chacun reçoit le don de manifester l’Esprit pour le bien de tous.

         On ne peut approfondir en quelques minutes la richesse du message transmis par ces lectures. A chacun de méditer ces textes et de les faire passer dans sa vie : c’est Jésus ressuscité qui me communique son Esprit ; cet Esprit agit avec puissance lorsque nous sommes réunis en Eglise pour prier ; l’Esprit réalise la communion entre nous par la diversité de ses dons. Pour aider à une telle intériorisation de la Parole de Dieu je me contenterai de souligner deux aspects de cette présence de l’Esprit : la connaissance de la vérité et la communion d’amour qui  nous unit à Dieu et aux autres.

         Si vous demeurez dans ma Parole, vous êtes mes disciples (Jn 8,31). Demeurer dans la Parole de Dieu, c’est   laisser Dieu me parler au cœur. L’Esprit qui a parlé autrefois par les prophètes, c’est l’Esprit de Jésus et il me donne de le connaître vraiment. L’Esprit de vérité vous conduira vers la vérité tout entière (Jn 16,13). Cette vérité tout entière, c’est le don que Dieu fait à l’humanité en son Fils Jésus : Si tu savais, si tu connaissais le don de Dieu (Jn 4,10) disait Jésus à la Samaritaine. Il le redit à chacun de nous aujourd’hui : si tu savais… Et ce don de Dieu, c’est sa vie, c’est le don de son amour. Dans sa grande prière avant d’entrer dans la Passion, prière qu’il adresse à son Père mais qui est aussi une confidence faite à ses amis, Jésus demande précisément : que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux. (Jn 17,26) L’Esprit Saint est cet amour du Père pour le Fils et du Fils pour le Père. Et recevoir l’Esprit c’est avoir part à la vie même de Dieu. La vie éternelle c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu et celui que tu as envoyé, Jésus Christ (Jn 17,3). Si vous me connaissiez vous connaîtriez aussi mon Père (Jn 8,19). Et saint Paul affirmait : sans le Saint Esprit, personne n’est capable de connaître qui est Jésus et de dire : Jésus est le Seigneur (1 Cor 12,3). Autrement dit, l’Esprit Saint nous introduit dans la vraie connaissance du Fils et dans cette communion de charité qui est la vie même de Dieu. Par l’Esprit et dans l’Esprit nous devenons ainsi fils et filles du Père dans le Christ, le Fils unique.

         Connaître le dessein d’amour de Dieu, à l’œuvre dès la création et pleinement manifesté en Jésus, nous introduit dans ce courant d’amour. Or, connaître l’amour c’est se savoir aimé et c’est déjà aimer : Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui (Jn 14,23). Quiconque n’aime pas n’a pas découvert Dieu puisque Dieu est amour (1 Jn 4,8).

         Mais pour aimer de cet amour, il nous faut entrer dans la même démarche de pauvreté de Dieu lui qui, de riche qu’il était, s’est fait pauvre en Jésus pour nous rejoindre dans notre pauvreté et nous permettre d’accueillir son amour. L’Esprit Saint est à la fois ce don du Père et du Fils et leur communion, une communion si parfaite qu’elle garde l’unicité de Dieu  dans la diversité des personnes : je crois en un seul Dieu redirons-nos dans un instant. Oui, il est grand le mystère de la foi !

         Dans le cœur de qui le reçoit l’Esprit creuse aussi le don. Aimer en vérité, c’est se donner totalement et devenir assez pauvre pour que l’autre puisse combler notre pauvreté de son amour. Ceci est vrai de l’amour pour Dieu mais aussi de l’amour entre époux ou entre amis et de tout amour vrai. Il est impossible d’aimer en vérité tant qu’on se sent plus riche que l’autre ! Seule cette pauvreté nous permet d’accueillir les autres avec toute la richesse de leur diversité de tempéraments, d’opinions, de vocations, de services, de fonctions… Il n’y a de communion que dans l’acceptation joyeuse de cette diversité sinon ce serait la fusion ou l’absorption. Double difficulté du véritable amour tel que Dieu le vit et tel qu’il nous l’a révélé en Jésus. Seule une telle attitude de pauvreté devant l’autre et d’acceptation réciproque de nos diversités permet à l’Esprit Saint de réaliser une communion qui soit une image de la vie trinitaire, et faire de nous véritablement le Corps du Christ. Qu’eux aussi soient un comme toi et moi nous sommes un ! (Jn 17,11) Accueillons, frères et sœurs, ce fruit de l’Esprit dont nos communautés de vie, notre Église et le monde ont tant besoin et devenons ainsi dans la joie, des artisans d’unité, de paix et de communion. Oui, c’est cela le mystère de Pentecôte.