Homélie - TO 3 — Abbaye de Tamié

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Homélie - TO 3

Par Frère Antoine
croix - arcabas
3ème dimanche du temps ordinaire - B


1ère lecture : A l'appel du prophète, les païens se convertissent (Jon 3, 1-5.10)   Lecture du livre de Jonas
La parole du Seigneur fut adressée de nouveau à Jonas : « Lève-toi, va à Ninive, la grande ville païenne, proclame le message que je te donne sur elle. » Jonas se leva et partit pour Ninive, selon la parole du Seigneur. Or, Ninive était une ville extraordinairement grande : il fallait trois jours pour la traverser. Jonas la parcourut une journée à peine en proclamant : « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! » Aussitôt, les gens de Ninive crurent en Dieu. Ils annoncèrent un jeûne, et tous, du plus grand au plus petit, prirent des vêtements de deuil. En voyant leur réaction, et comment ils se détournaient de leur conduite mauvaise, Dieu renonça au châtiment dont il les avait menacés.

Psaume : Ps 24, 4-5ab, 6-7, 8-9
R/ Fais-nous connaître tes chemins, Seigneur !
Seigneur, enseigne-moi tes voies,
fais-moi connaître ta route.
Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi,
car tu es le Dieu qui me sauve.

Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse,
ton amour qui est de toujours.
Oublie les révoltes, les péchés de ma jeunesse ;
dans ton amour, ne m'oublie pas.

Il est droit, il est bon, le Seigneur,
lui qui montre aux pécheurs le chemin.
Sa justice dirige les humbles,
il enseigne aux humbles son chemin.

2ème lecture : Le monde passe : vivons ce temps pour le Seigneur (1 Co 7, 29-31)
Lecture de la première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens
Frères, je dois vous le dire : le temps est limité. Dès lors, que ceux qui ont une femme soient comme s'ils n'avaient pas de femme, ceux qui pleurent, comme s'ils ne pleuraient pas, ceux qui sont heureux, comme s'ils n'étaient pas heureux, ceux qui font des achats, comme s'ils ne possédaient rien, ceux qui tirent profit de ce monde, comme s'ils n'en profitaient pas. Car ce monde tel que nous le voyons est en train de passer.

Évangile : Jésus invite les hommes à la conversion, et appelle ses premiers Apôtres (Mc 1, 14-20)   Acclamation : Alléluia. Alléluia. Le règne de Dieu est venu jusqu'à vous ; croyez à la Bonne Nouvelle. Alléluia. (Mc 1, 15)  
Évangile de Jésus Christ selon saint Marc
Après l'arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait : « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. » Passant au bord du lac de Galilée, il vit Simon et son frère André en train de jeter leurs filets : c'étaient des pêcheurs. Jésus leur dit : « Venez derrière moi. Je ferai de vous des pêcheurs d'hommes. » Aussitôt, laissant là leurs filets, ils le suivirent.
Un peu plus loin, Jésus vit Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient aussi dans leur barque et préparaient leurs filets. Jésus les appela aussitôt. Alors, laissant dans la barque leur père avec ses ouvriers, ils partirent derrière lui.
© AELF

          Homélie

«  Après l’arrestation de Jean, Jésus part pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu. Il disait : « Les temps sont accomplis, le Règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous, croyez à la Bonne Nouvelle ».

I - a) « Convertissez-vous ». A quoi fait penser le mot « conversion »? (chômeur en quête d’emploi, Jonas, Jean-Baptiste...). Jésus n’associe pas d’abord la conversion à la rémission des péchés mais à la foi : «  croyez à la Bonne Nouvelle, à l’Évangile ». Sa proclamation n’a pas d’autre contenu que celle de croire que le Règne de Dieu est tout proche ». « Croyez à l’Évangile ». D’après st Paul (Romains 1, 16) l’Évangile est une force de Dieu, un dynamisme qui sauve ceux qui croient. Non pas d’abord un message sur Dieu ou sur Jésus ou un message de Dieu, mais d’abord et essentiellement une force qui agit dans l’histoire des hommes, dans notre histoire, aujourd’hui. C’est cela qu’il faut essayer de comprendre et de vivre. La Parole de Dieu qui nous est adressée, ici et maintenant, c’est une force si nous l’accueillons pour ce qu’elle est : la présence efficace du divin dans nos vies d’hommes. Pas évident ! Non. Forcément. Il s’agit non d’évidence mais de foi, d’accepter que l’impossible soit possible, l’impossible bonheur de l’homme, de l’humanité tout entière. Une Bonne, une heureuse Nouvelle.
    b) Objection : le monde va mal ! Et  Dieu a disparu de nos vies ! Chacun de nous fait l’expérience du mal dans sa vie personnelle (maladies, accidents, chômage, divorce...) dans sa vie sociale, économique (la France qui perd son triple A), dans la vie ecclésiale (l’Église est attaquée non seulement de l’extérieur (persécutions au Nigeria, en Inde, même en France) mais aussi de l’intérieur (division des chrétiens - nous sommes dans la semaine de l’unité - et à l’intérieur même des différentes confessions). Où est la Bonne, l’heureuse Nouvelle ?

II - Accepter de croire à la Bonne Nouvelle et donc d’espérer.
a.    Ne pas perdre de vue que notre foi s’enracine dans la Pâque du Christ. Une Pâque qui englobe toute sa vie. En st Marc Jésus est présenté comme de plus en plus marginalisé et isolé. D’abord par les autorités juives, puis par les foules qui l’abandonnent, ensuite par sa famille (sauf Marie et quelques femmes), par  ses propres disciples et enfin, le comble, son Père ne répond pas à ses cris ! Jésus qui est passé en faisant le bien a été rejeté, mis à mort et, même ressuscité, il gardera éternellement les traces de ces rejets, les stigmates des souffrances que les hommes lui ont infligées ! Il a cru, jusqu’au bout que le Bien serait vainqueur du Mal.
b.    Une autre référence : Marie, mère des croyants. Comment a-t-elle pu dire son Magnificat ? : que les orgueilleux sont  humiliés, que les puissants sont renversés de leur trône, ce n’est pas vrai ! elle en fera l’expérience quand Hérode la fera fuir en Egypte pour sauver Jésus. Et si aujourd’hui certains puissants sont renversés de leurs trônes d’autres prennent aussitôt leur place ! Si Marie parle ainsi c’est qu’elle a fait l’expérience du salut, de la présence incroyable de Dieu dans sa vie et du coup, elle voit les choses du coté de l’espérance, Le Royaume s’étant approché d’elle, elle voit la force de Dieu en train de transformer notre pauvre existence humaine, de la transformer elle-même en la faisant exister de façon nouvelle, capable d’espérer au-delà de ce qu’elle peut comprendre et malgré les souffrances qui s’accumulent.

III  A quelle conversion sommes-nous donc appelés ?
Individuellement, c’est à chacun de voir comment il va répondre ou pas, dans la foi, à cette interpellation que Jésus nous fait ce matin : « Convertissez-vous ! » « Convertis-toi ! ». Est-ce que je reçois cette parole comme une force, une présence qui me permet de traverser les épreuves parfois terribles de ma vie actuelle ? Pour nous aider, en plus des récits évangéliques, nous avons l’exemple de frères chrétiens actuellement persécutés, et même de frères ou de soeurs en humanité qui ne sont pas forcément chrétiens mais qui se sont ouverts à la force de l’Esprit par exemple Etty Hillesum en camp de concentration…
Collectivement et ecclésialement nous devons nous convertir à l’espérance (croire à la Bonne Nouvelle) et ne pas nous laissez prendre par le courant pessimiste qui voit tout en noir. Cf. le discours d’ouverture du Concile Vatican II par Jean XXIII. : « Nos oreilles sont offensées en apprenant ce que disent certains qui, bien qu’enflammés du zèle religieux […] ne voient que ruines et calamités ; ils ont coutume de dire que notre époque a profondément empiré par rapport aux siècles passé […] Il nous semble nécessaire de dire notre désaccord avec ces prophètes de malheur qui annoncent toujours des catastrophes » (17.10.62). Et si la crise de l’Église était un appel à la conversion pour nous catholiques, protestants, anglicans ou autres disciples de Jésus ? Nous avons mieux à faire que de nous lamenter ou de nous résigner. Ne sommes-nous pas appelés à aimer une Église humble, minoritaire, souvent ignorée ou méprisée voire persécutée, mais qui se tient au pied de la croix avec Marie dans une espérance qui ne déçoit pas ?

L’évangile d’aujourd’hui continue avec l’appel des disciples pour qu’ils soient « pêcheurs d’hommes ». Cet appel résonne encore aujourd’hui et s’adresse aussi à nous. Disciples de Jésus, nous sommes appelés à être des hommes et des femmes de l’Espérance, de la foi en la Bonne Nouvelle. L’espérance se vit toujours dans un contexte d’épreuves. Notre monde éprouvé a besoin de témoins de l’Espérance. Croyons à la Bonne Nouvelle de Dieu, au Royaume tout proche de nous. Croire au salut du monde c’est croire que la Création voulue par Dieu réussira, qu’elle aboutira au Royaume tout proche de nous