Homélie TO 32 — Abbaye de Tamié

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Homélie TO 32

Par Frère Patrice
arcabas - tamié
Homélie pour le 32ème dimanche
du temps ordinaire

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc (13, 24-32)

Jésus parlait à ses disciples de sa venue :
« En ces temps-là, après une terrible détresse, le soleil s'obscurcira et la lune perdra son éclat. Les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l'homme venir sur les nuées avec grande puissance et grande gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, de l'extrémité de la terre à l'extrémité du ciel.
Que la comparaison du figuier vous instruise : Dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l'été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l'homme est proche, à votre porte. Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n'arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant au jour et à l'heure, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. »

 © AELF


Homélie

A première vue, c’est un passage d’évangile peu engageant. Et pour peu qu’on soit  pessimiste ou dépressif, on peut alors être amené à broyer du noir et à se dire que Dieu ne nous veut pas que du bien ! Et pourtant ce texte est plein d’espoir !

Il est vrai que tout commence par une vision d’Apocalypse, une véritable démolition du monde par le déchaînement des éléments naturels, comme on l’a d’ailleurs vu avec les tempêtes de Xinthya ou de Sandy tout récemment. Mais regardons-y de plus près.

Dans le récit de la Genèse Dieu, avant même de créer l’homme, créa les étoiles, le soleil, la lune, bref tout ce qui va rythmer le temps et va servir de repère à l’homme qui viendra habiter cette terre.

Peu après surviendra le déluge qui engloutira beaucoup de choses mais où l’homme sera préservé. Déjà là on peut lire que l’homme est crée pour l’éternité, que les grandes tempêtes ne peuvent l’engloutir.

Lorsque Dieu agit dans l’histoire, le cosmos réagit : l’étoile qui annonce la naissance du Christ, les ténèbres qui recouvrent la terre lors de sa mort. Dieu  nous rappelle ainsi qu’il est là et qu’il agit. Mais il le rappelle surtout par d’autres signes ! Pensez au rameau d’olivier que portait la colombe  après le déluge ; regardez les branches de l’olivier sur lesquelles les feuilles commencent à verdir après le déchaînement des éléments naturels. Dieu n’abandonne pas le monde ; il lui donne de toujours repartir pour une vie nouvelle fondée sur la paix que symbolisent chacun à sa façon l’olivier ou le figuier.

Alors si le monde repart sur une vie nouvelle, pourquoi n’en serait-il pas de même pour l’homme ? Il en a d’autant plus besoin que Dieu lui a fait perdre tous ses repères dans la tempête. Pourquoi  lui a-t-il fait perdre tous ses repères? Probablement pour   qu’il puisse concentrer toute son attention et tout son regard sur Celui qui vient, sur le Fils de l’Homme. Vous avez bien sûr vu toutes ces images où après la tempête les sauveteurs arrivent pour aider les gens totalement démunis. Ils n’ont d’yeux que pour ceux ou celui qui vient à leur rencontre. Il en ira de même pour nous : au milieu du désert créé par la tempête nous verrons le Fils de l’Homme venir à notre rencontre. Quel « ouf » de soulagement sortira de nos cœurs, d’autant plus grand que celui qui vient n’est pas un inconnu ! Mais alors se pose la question pour nous : saurons-nous le reconnaître, l’avons-nous vraiment désiré, saurons-nous l’entendre, saurons-nous lui donner notre confiance ? D’autant qu’il est celui qui frappe à la porte, qui se tient à la porte, mais qui attend de nous un signe de reconnaissance pour pouvoir entrer. Et puis en aurons-nous peur, tout comme beaucoup de gens disent encore qu’ils ont peur de Dieu ?

Mais au fait pourquoi en aurions-nous peur ? D’autant plus qu’il ne nous parle pas du tout de jugement. Il nous parle « d’élus ». Cela ne veut pas du tout forcément dire qu’il y aura des laissés pour compte en plus ou moins grand nombre.  Car à partir du moment où il nous a crées, n’est-ce pas le signe qu’il nous a déjà élus ? Quel est ce Père qui créerait ses enfants pour les maudire ? Bien au contraire, il vient pour nous rassembler et nous rassembler tous de tous les confins de la terre. Rassembler : c’est en un certain sens rebâtir un nouveau monde où tous les éléments coopèrent à faire un seul édifice, au contraire du monde où tout était tombé dans le tohu bohu. Rassembler c’est aussi faire disparaître toutes les séparations que nous avons établies entre nous. Et cela ne peut se faire qu’avec le moteur de la charité, celle-là même sur laquelle nous serons amenés un jour à rendre des comptes.

La peur, celle-là même que les apôtres ont vécu un jour sur le lac de Tibériade alors qu’ils étaient avec Jésus sur une barque que la tempête menace de faire couler. Là aussi les éléments naturels s’étaient déchaînés, là aussi les « élus » étaient rassemblés,  là aussi la nuit régnait, là aussi le doute les saisissait, là aussi tout repère était perdu. La seule ressource qu’il leur reste c’est de crier vers Jésus, de faire cet acte de foi de reconnaître qu’ils ne peuvent plus rien par eux-mêmes et de croire, intuitivement, que seul Jésus peut les sauver. « Pourquoi avez-vous peur gens de peu de foi?». La peur qui peut nous saisir quand nous ne savons pas quand tout cela se passera ? C’est oublier que les paroles de Jésus sont fermes au contraire de tout ce qui est éphémère. Il nous est demandé de croire. Pas facile me direz-vous ? Peut-être. Mais alors je ne peux que vous citer cette pensée de Thérèse d’Avila qui me vient souvent à l’esprit, et que l’on a retrouvé au jour de sa mort dans son livre d’heures :
Que rien ne te trouble
Que rien ne t’épouvante
Tout passe
Dieu ne change pas
La patience triomphe de tout
Celui qui possède Dieu ne manque de rien
Dieu seul suffit