Homélie - TO 5 — Abbaye de Tamié

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Homélie - TO 5

Par dom Jean-Marc Thévenet
croix - arcabas
Homélie pour le 5ème dimanche
du temps ordinaire

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En quittant la synagogue, Jésus, accompagné de Jacques et de Jean, alla chez Simon et André.
Or, la belle-mère de Simon était au lit avec de la fièvre. Sans plus attendre, on parle à Jésus de la malade. Jésus s'approcha d'elle, la prit par la main, et il la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait.
Le soir venu, après le coucher du soleil, on lui amenait tous les malades, et ceux qui étaient possédés par des esprits mauvais. La ville entière se pressait à la porte. Il guérit toutes sortes de malades, il chassa beaucoup d'esprits mauvais et il les empêchait de parler, parce qu'ils savaient, eux, qui il était.
Le lendemain, bien avant l'aube, Jésus se leva. Il sortit et alla dans un endroit désert, et là il priait.
Simon et ses compagnons se mirent à sa recherche.
Quand ils l'ont trouvé, ils lui disent : « Tout le monde te cherche. »
Mais Jésus leur répond : « Partons ailleurs, dans les villages voisins, afin que là aussi je proclame la Bonne Nouvelle ; car c'est pour cela que je suis sorti. »
Il parcourut donc toute la Galilée, proclamant la Bonne Nouvelle dans leurs synagogues, et chassant les esprits mauvais.
© AELF

Homélie

 « Vraiment, la vie de l’homme sur la terre est une corvée ! » se lamentait Job.

Au lendemain d'une bénédiction abbatiale nous ne pouvons que souhaiter à celui qui, au nom de l'Eglise a reçu la charge pastorale de cette communauté, de ne jamais ressentir un tel accablement !...

Mais à dire vrai, je n'ai guère d'inquiétude pour Père Ginepro. Je suis bien certain que la grâce reçue du Seigneur lors de cette bénédiction abbatiale ne lui manquera pas, de même que le soutien de ses frères et de beaucoup qui l'accompagnent de leur affection et de leur prière. Et puis, sa foi simple et robuste, son expérience et sa sagesse sont d’heureux antidotes aux risques de dépression.

Par contre, nous savons bien qu’à travers le monde des multitudes d’hommes, de femmes et d’enfants, subissent des conditions de vie infra humaine bien pire qu’une corvée. Des bidonvilles aux camps de réfugiés, en passant par les prisons et les hôpitaux, ils ne connaissent de l’existence que le malheur et le dénuement le plus total. Et, jusqu’auprès de nous, tant de personnes dont la vie est un calvaire ou un enfer !...

Oui, innombrables sont ceux qui, avec Job, peuvent exhaler cette plainte : « Je ne compte que des nuits de souffrance… » Et pas seulement des nuits, mais aussi des jours, une existence entière : « Ma vie n’est qu’un souffle, mes yeux ne voient plus le bonheur. »

On comprend que les contemporains de Jésus, bien plus démunis que nous face à la maladie, aux épidémies et aux cataclysmes, en découvrant sa puissance de guérison, aient mis tout leur espoir en lui : « on lui amenait tous les malades, et ceux qui étaient possédés par des esprits mauvais. La ville entière se pressait à la porte. »

Ainsi Jésus guérit ceux qu’il rencontre sur sa route, car aucune détresse ne le laisse indifférent, mais les guérisons et les miracles qu’il accomplit sont bien davantage qu’une simple réaction d’humanité. Elles sont les signes qui révèlent quelque chose de plus essentiel pour la vie de l’homme, à savoir que notre Dieu est un Dieu de vie qui non seulement n’a pas fait ni voulu la souffrance et la mort, mais qui ne peut se résoudre à abandonner l’homme aux forces de mal et de mort qui le blessent et le défigurent.

Voilà la Bonne Nouvelle que Jésus est venu nous révéler et pour laquelle il a donné sa vie. Une Bonne Nouvelle tellement vitale que Jésus a hâte de la répandre  : “Partons ailleurs afin que là-bas aussi je proclame la Bonne Nouvelle.” En chargeant ses disciples de l’annoncer jusqu’aux extrémités du monde, il désire délivrer notre monde de souffrances et de peines du désespoir en y introduisant l’immense et joyeuse espérance : nous ne sommes pas nés pour des corvées d’esclave mais pour devenir les héritiers du bonheur même de Dieu. Nous ne sommes pas des êtres-pour-la-mort mais pour la Vie, une vie de communion et de joie éternelle.

A propos de cette même annonce l’apôtre Paul dira que c’est une nécessité qui s’impose à lui : « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Evangile ! » Et cet Evangile, loin d’être une doctrine à enseigner, est une personne à rencontrer et à aimer : Jésus le Seigneur. Avec Lui et par Lui, nos existences peuvent trouver une saveur et une paix nouvelles : « Venez à moi vous tous qui peinez et êtes écrasés sous le poids des épreuves. Je vous procurerai le repos. » 

Nous sommes tous concernés par cette Bonne Nouvelle, tous bénéficiaires, et donc aussi tous appelés à en témoigner. Mais attention, notre foi en Jésus Sauveur n’est pas de l’ordre de la magie ! Comme si Jésus était “la solution à tous nos problèmes”, ou l’assurance tout-risques nous préservant du malheur et nous délivrant des épreuves de l’existence ! Jésus lui-même n’a en rien échappé aux dures conditions de la vie humaine. Il a connu les contradictions et l’échec jusqu’à subir les angoisses de l’agonie, la torture et la mort sur la croix. Voilà pourquoi il est pour nous, comme pour tout être humain “le Chemin, la Vérité et la Vie”, le seul par qui nous puissions, dans ce monde de larmes et de mort, demeurer fermes dans l’espérance… et goûter à une joie que le monde est incapable de nous procurer et même d’imaginer.

Jésus a confié à son Eglise la responsabilité de transmettre aujourd’hui Sa Bonne Nouvelle. Il est incontestable que les chrétiens ont pris au sérieux cette mission : tout au long des siècles une multitude d’hommes et de femmes se sont donnés sans compter auprès des malades, des prisonniers, des lépreux, des orphelins et des veuves, des esclaves et des prostitués… bref auprès des blessés et des souffrants de l’existence. Ils n’agissaient pas pour en tirer profit, mais parce que la miséricorde de Dieu les avait saisis.

À chacun de nous incombe donc aujourd’hui la mission de maintenir vivante cette Bonne Nouvelle par sa propre vie de foi et par son engagement actif envers ceux qui sont dans la peine et l’épreuve. Comme le disait St Paul : “c’est une nécessité qui s’impose” à nous.

Le Seigneur nous a tant donné ! En retour soyons des témoins de sa présence et de sa miséricorde. Rude mission !... mais à qui engage sa vie sur Lui et pour Lui, l’Esprit Saint ne fera pas défaut.