Homélie - Avent 3 — Abbaye de Tamié

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Homélie - Avent 3

Par Frère Raffaële
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3ème dimanche de l'avent

Introduction

"Soyez toujours dans la joie ! " Ces paroles de saint Paul de la deuxième lecture donnent le ton à cette messe. Le mot 'joie' reviendra comme un refrain dans les lectures, les prières, les chants de cette messe.
Avons-nous le droit d'inviter à la joie quand nous voyons tant de souffrances dans le monde, autour de nous et peut-être aussi en nous ? Et pourtant nous osons le croire envers et contre tout : le Seigneur vient encore aujourd'hui porter la bonne nouvelle aux pauvres, guérir ceux qui ont le coeur brisé, annoncer aux prisonniers la délivrance, comme nous le dira le prophète Isaïe. Préparons-nous à recevoir celui qui vient guérir nos blessures et pardonner nos péchés.

Homélie


- Deux grandes figures nous accompagnent sur la route de l'Avent jusqu'à la fête de Noël qui approche. Un homme et une femme : Jean le Baptiste et Marie de Nazareth.

La présence de Marie est encore discrète dans la liturgie de ce dimanche, alors qu'elle sera centrale dimanche prochain, où nous entendrons le récit de l'Annonciation dans l'Évangile de S. Luc. Pourtant, cette présence est déjà bien réelle, et contribue beaucoup à créer l'ambiance de joie caractéristique de ce dimanche Gaudete, car Marie est une grande donatrice de joie.

Nous avons reconnu, comme en filigrane, la voix de Marie dans les paroles prophétiques de la première lecture, tirée du livre d'Isaïe : « Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. Car il m'a enveloppée du manteau de l'innocence, il m'a fait revêtir les vêtements du salut, comme une mariée met ses bijoux. » Et surtout, la joie de Marie éclate dans le chant qui a répondu à cette lecture : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur. » Vous avez assurément reconnu là les paroles du Magnificat, le grand cantique d'action de grâces de Marie. Oui, par la bouche de Marie c'est déjà toute l'Église, autrement dit nous tous, qui chante sa joie, car Jésus le Sauveur est proche.

Mais la liturgie de ce dimanche oriente notre regard surtout vers Jean le Baptiste, le plus grand des enfants des femmes, comme l'a proclamé Jésus lui-même (Mt 11, 11) ; cette figure si attirante, malgré ses dehors austères, et même un peu rudes à première vue. L'évangile que nous venons d'entendre définit en quelques mots percutants le rôle essentiel de Jean-Baptiste dans l'histoire sainte : c'est un rôle de témoin. « Il était venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, afin que tous croient par lui. » (Jn 1, 7) Jean s'est préparé à cette mission par de longues années de désert. L'évangéliste S. Luc décrit en peu de mots ce noviciat de Jean-Baptiste adolescent : « L'enfant grandissait, et son esprit se fortifiait. Et il demeurait dans les déserts jusqu'au jour de sa manifestation à Israël. » (Lc 1, 80)

Ce qui surgit du désert, lorsque l'Esprit l'appelle pour accomplir sa mission, c'est une voix. Tout le reste semble disparu, ne compte plus. Les énergies de cet homme se sont unifiées, concentrées ; tout est devenu voix. Jean est « la voix qui crie à travers le désert », la voix qui retentit dans le silence de tout le créé.

Cette voix s'exprime dans un langage dépouillé, essentiel : des mots brefs, tranchants ; les mots d'un homme qui a passé sa vie dans le silence et qui ne le rompt que dans la mesure strictement nécessaire. « Je ne suis pas le Messie. » « Qui es-tu donc ? Es-tu le prophète Élie ?» « Non. » « Alors, es-tu le grand Prophète ? » « Non. Je ne suis qu'une voix. »

Jean ne vit que pour celui dont il est le témoin et le précurseur. Ce qu'il dit de lui-même est simplifié à l'extrême : des formules négatives, aussi courtes que possible. Ce qui compte, c'est l'Autre, « celui qui vient derrière moi ». Le message de Jean est l'annonce de la proximité de Jésus le Messie, de sa venue imminente. Davantage même : l'annonce de sa présence déjà là, mais encore voilée. «Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas. » Cette parole de Jean-Baptiste n'a rien perdu de sa pertinence ni de son actualité. Elle s'adresse aussi à nous aujourd'hui : « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas. » Connaissons-nous vraiment Jésus-Christ, non pas au sens d'une connaissance intellectuelle, d'un savoir, mais au sens biblique d'une communion vitale, d'une intimité aimante ? Faisons-nous l'expérience de la lumière et de la joie du message évangélique, au moins un peu ? En quoi le Christ nous a-t-il changés ? Peut-être celui qui est déjà venu voilà deux mille ans reste-t-il encore à venir dans nos coeurs et dans le quotidien de nos vies. « Au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas » : c'est le message central de la liturgie en ce 3e dimanche de l'Avent.

Présence déjà, mais encore cachée, de Jésus. Il y a, heureusement, les saints, les grands témoins de Jésus qui, aujourd'hui encore, sillonnent la terre. Il y a aussi nous-mêmes, appelés par notre baptême à être les témoins de Jésus. Il y a les pauvres, les malades, tous ceux qui nous renvoient l'image de Jésus serviteur souffrant. Il y a enfin le grand miracle de l'eucharistie, où Jésus se rend présent, dans sa Parole proclamée et dans le mystère du pain et du vin qui deviennent le Corps livré et le Sang versé. C'est ce mystère que nous allons célébrer maintenant.