Les documents sur la fondation de Tamié — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Les documents sur la fondation de Tamié

Transcriptions de pièces
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Comment est connue la fondation de l'Abbaye de Tamié ?


À l'époque de la Révolution française exportée en Savoie en 1792, les moines furent chassés de l'Abbaye de Tamié et leurs archives furent dispersés.
Quelques fragments ont été retrouvés et des copies de pièces anciennes avaient été exécutées et ne se trouvaient pas à l'Abbaye à cette époque.
Les Archives départementales de la Savoie contiennent des originaux, produits par le Sénat de Savoie, cote : ADS, B1692 particulièrement et dans la série SA, 206.

Parmi les pièces importantes revenues, signalons :

* Inventaire général des titres de l’abbaye de Tamié, que l'abbé dom Nicolas-Nicolas de Riddes avait fait dresser vers 1650. Il y est recensé un grand nombre de pièces depuis l’origine. Cet Inventaire général a servi de base à Bernard (Félix) pour son livre : L’abbaye de Tamié, ses Granges (1132-1793), Grenoble, 1967.
Nous y trouvons des mentions de documents datés de 1132.
* Folio 190 : Fondation de Thamié en 1132, en laquelle Paini et Martin Des Noyers et leurs neveux échangèrent avec Thamié des prés à Thamié pour la chènevière à Gemilly de Ponce de Tournon qu'il avait de saint Pierre. Pierre Dodon échangea avec les mêmes pour ladite chènevière des prés sis à Thamié.
* F° 212 : Fondation de Thamié en 1132, en laquelle Utbold prieur de Cléry donne à Thamié une pièce de terre sise à St-Ferréol. Burnon de Plancherine donne à Thamié 1 journal sis à St-Ferréol pour 1 sextier de fèves, 1 émine orge et 7 sextiers avoine.
* F° 360 : Fondation de Thamié de l'an 1132, en laquelle Guinis prêtre du Pont, son fils et Henry prieur de Ste-Marie donnèrent à Thamié tout ce, qu'ils prétendaient des dismes des terres possédées par Thamié, rière le Pont jusqu'à Prissin et jusqu'à 4 journaux de celles qu'ils acquerraient, pour 10 sols.
* F° 386 : Fondation de Thamié de 1132, par laquelle Guillaume des Arsisces et sa femme donnèrent à Thamié, une pièce de terre et un pré aux Estables pour 100 sols, sous la caution de Guillaume de la annuo.
* F° 403 : Fondation de Thamié de 1132, en laquelle Amblard du Pont donna à Thamié la moitié de la Vavre pour 8 livres et 5 sols.
* F° 409 : Fondation de Thamié de 1132, en laquelle Bernard de Carpeneto, avec sa femme donna à Thamié une pièce de terre rière Veray apud Roifeum pour 350 sols. Des particuliers pour les laouds eurent 10 sols.
* F° 410 : Fondation de Thamié de l'an 1132, en laquelle Louis de Bergon donna à Thamié quamdam corvatam et les droits de pâturages partout et de couper des bois par tout Prissin pour 12 livres.
* F° 430 : Fondation de Thamié en 1132, en laquelle Guillaume de Menthon donne à Thamié la 4ième partie du mas Riffier tenue par Pierre Reu, à condition que ledit Reu payera pendant sa vie à Thamié 20 sols de servis, et venant à mourir sans hoir légitime l'héritier payera à Thamié comme faisait son père.
* F° 441‑442 : Fondation de Thamié de 1132, en laquelle Guillaume Humbert, de Duin donna à Thamié sa terre en Glières pour 100 sols.

* Un autre document en latin, publié par la Gallia Christiana XI, instrumenta 380, n’est pas une charte d’origine, mais une relation plus tardive sur les débuts. Nous en donnons une traduction :

L'an de l'Incarnation du Seigneur 1132, marque de l'immense bonté de Dieu, l'archevêque dom Pierre de Tarentaise eut les yeux attirés par un endroit situé dans son archevêché, lieu dénommé Tamié et, dans son esprit, propre à y établir une fondation de l'Ordre cistercien. De cet endroit, il demanda à ses propriétaires de le lui céder, à savoir aux frères Pierre, Guillaume et Aynard de Chevron. Et de fait, dans la suite, il plut à ce même vénérable archevêque de convoquer en ce même lieu dom Jean, de pieuse mémoire, abbé de Bonnevaux, et les frères susmentionnés, avec beaucoup d'autres personnes. Et là, Pierre avec sa femme, et Guillaume avec sa femme et son fils Guillaume, ayant reçu mission de représenter leur frère Aynard, absent à ce moment-là — à la demande du susmentionné archevêque, faite devant tous ceux qui étaient là présents — ont donné à Dieu, à la bienheureuse Marie et à Jean, abbé de Bonnevaux, et à ses frères, pour s'y vouer à Dieu, pour leur salut et celui de leurs parents, ce qu'ils possédaient sur le mont Tamié s'y étendant selon la direction que prend l'eau qui descend du sommet des montagnes sur l'un et l'autre versant jusqu'à la rivière qui coule au milieu de la vallée, à l'exception de quelques fiefs, mas et fermes qui sont occupées par eux ; mais si, dans la suite, les membres de la communauté en arrivaient à pouvoir se porter acquéreurs de ces mêmes fiefs, il les ont cédés de la même manière, mais sous le couvert d'une convention telle qu'ils ne perdent pas les redevances vassaliques liées à ces fiefs, et s'ils les perdaient, qu'ils n'en reportent pas la responsabilité sur la communauté des frères.
De ce don sont témoins : Pierre de Tarentaise, archevêque, dom Jean, abbé de Bonnevaux, frère Jean, prieur du même lieu, frère Amédée d’Hauterive, frère Aldemar, frère Pierre, frère Wilfred, qui ont reçu tous ensemble cette donation.
Sont aussi témoins : Ubold de Cléry, Sigrand de Chevron, le prêtre Julien, le clerc Ponce et son frère Aynard, Bertrand et son fils Hugues, et Bonnefoi de Tournon, Roland de Saxo, Anselme de Bellecombe, Guillaume Remestangue, Hugo de Seythenay et beaucoup d’autres.
Et de même que Pierre et Guillaume de Chevron avaient donné tout ce qu’ils possédaient au susdit mont de Tamié, ainsi Aynard, leur frère, avec son fils et son épouse, a donné tout ce qu’il possédait au même lieu. Sont témoins : Garnier et son frère, et les frères Amédée et Aldemar, qui reçurent cette donation à Pontverre.

* Autres documents en latin aux Archives départementales de Savoie, dans le fonds du Sénat (ADS série B) et publiés par Burnier (Eugène) dans Histoire de l’abbaye de Tamié en Savoie, Chambéry, 1865, pages 239-241 (traduction).
Sous l'inspiration de la clémence divine, veillant à la bonne marche de l'Ordre cistercien et à sa propagation, il vint à l'idée du comte et marquis Amédée, de demander à dom Pierre, (ancien abbé de la Ferté) archevêque de Tarentaise et humble et fidèle moine de ce même Ordre, d'apporter tout son soin à trouver dans son comté un endroit dont l'excellence se révélât favorable à la fondation d'une maison de son Ordre. En conséquence de quoi, rempli d'un saint zèle et poussé par la grâce de l'Esprit, il porta son choix sur un lieu du nom de Tamié, mais qui allait se révéler par trop exigu et insuffisant pour les besoins des frères.
C'est pourquoi, dom Pierre, le susdit archevêque, sous l'impulsion de la grâce divine, s'en vint avec quelques frères trouver Amédée, comte du Genevois et le supplier, pour le salut de son âme et de celles de ses aïeux, d'accorder et de céder l'ensemble des droits qu'il avait ou qu'il estimait avoir sur la forêt et le domaine de Beaulieu, en faveur des frères au service Dieu, à Tamié, tant ceux de maintenant que ceux qui viendront à l'avenir. Ce qu'entendant, le susdit comte, bien que ce lieu lui fut très cher, pour répondre à la demande de l'archevêque, accepta, de bon gré, de le céder pour l'amour du Christ. Sont témoins de cette donation : Rodolphe de Faucigny, Envold de Nangey, Galceran de Cleis, Gauthier de Rumilly et un assez grand nombre d'autres encore.

Amédée, comte du Genevois, fit don à Dieu et à sainte Marie de Tamié et aux frères de ce même lieu de vingt sols chaque année, et cela, à perpétuité. Cette donation fut faite à Genève, chez le doyen Albéric. Il fit don également de la taxe perçue sur les marchés de l'ensemble de son domaine et vulgairement appelée leyde. Sont témoins de cette donation : Giraud de Nangers, Guillaume de l'Ile, Isund d'Annecy et son fils Ubold, Jocerand de Sciez et son fils Pierre, qui se portèrent garants de cette donation de ces sommes à la dite Eglise, donation à faire à Annecy chaque année le jour le plus proche de la saint André.
(Le notaire Chanterel affirme que le rouleau de parchemin sur lequel a été copiée la présente charte portait la date de 1132.)

Problème de la date de fondation


Janauschek (L.), dans Originum cisterciensum, Vienne 1877, : Tamié n’a pas été abbaye en 1132 comme les auteurs de la Gallia Christiana et d’autres le croient, car dans la charte de 1132, il s’agit d’un monastère à fonder et du lieu donné à cette fin à Jean, abbé de Bonnevaux (de la filiation de Cîteaux). Aussi sont-ce les moines de Bonnevaux qui construisirent les bâtiments du nouveau cœnobium où Pierre abbé avec toute une communauté, s’établit le 14 des calendes de mars 1133, c’est-à-dire le 16 février (1134).

De ces documents, il ressort que ceux datés de 1132 correspondent à des affaires économiques, principalement des cessions de terrains ou des échanges, ventes. Le but de l’ensemble est de constituer un capital foncier dont l’exploitation rapportera des produits destinés à un but précis, dans ce cas le fonctionnement d’un monastère cistercien : l’entretien des moines et la couverture de leurs autres nécessités ou obligations. Ceci correspond à la définition d’une Fondation au sens économique du terme. Par contre pour une communauté monastique, elle n’a d’existence que lorsque les moines sont rassemblés dans le but de vivre ensemble, dans un lieu prévu à cet effet.

Nous trouvons dans le dossier constitué par le Sénat de Savoie, en 1733, la mention suivante : « Le 14 des calendes de mars 1133, c’est-à-dire le 16 février 1133, des moines de Bonnevaux en Dauphiné, ayant Pierre à leur tête comme abbé, s’établirent à Tamié. »

Il subsiste un problème : le mois de février se trouve entre Noël et Pâques. Or ces deux fêtes ont servi à tour de rôle, de point d’origine de l’année. Si on prend comme point de départ de l’année 1133, le 25 décembre, le 16 février se trouve encore en 1133. Mais si on commence à compter les jours de l’année 1133, à partir de Pâques (avril 1133), le 16 février 1133 se trouvera après cette fête. Et si on transpose dans un comput où l’année commence le 25 décembre, le 16 février 1133 (cycle de Pâques) devient le 16 février 1134, (cycle de Noël ou du 1er janvier). C’est à cette dernière conclusion que s’est arrêté Janauschek : fondation de Tamié 1134 ainsi que tous ceux qui l’ont suivi. Or il s’avère très probable que dans la région de Tamié, il était encore fait usage du cycle de Noël, alors qu’à Genève, on était déjà passé au cycle de Pâques.

Conclusion : Fondation de Tamié en 1132 (sans précision de jour ni de mois) correspond à la constitution du fond de capital terrien, en vue d’établir une communauté monastique.

16 février 1133 : arrivée des moines à Tamié, venant de Bonnevaux, avec Pierre à leur tête. C’est le début de la vie monastique à Tamié.

Fondation de Tamié en 1134 est une hypothèse de Janauschek qui ne semble pas correspondre à la réalité historique sur la façon de calculer les dates à cette époque, dans la région de Tamié.