Homélie - 5ème dimanche de Pâques — Abbaye de Tamié

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Homélie - 5ème dimanche de Pâques

Fr. Patrice
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5ème dimanche de Pâques - C
Jean, 13, 31-35 - Tu aimeras.



Un des candidats à l'élection présidentielle a repris tout récemment le thème 'Aimez-vous les uns les autres" (comme quoi une éducation religieuse ressort même 50 ans après) mais sans dire comment ni pourquoi.

Lors d'une sépulture, sauf si le défunt a accompli de grandes réalisations, une des choses principales qu'on mentionne, mais dont on parle surtout, le souvenir au fond du coeur : combien on l'aimait et peut-être et surtout combien il manifestait son amour à tous ceux qui l'approchaient.

Alors que veut dire cette phrase prononcée par Jésus : Aimez-vous les uns les autres ? Pour le comprendre il faut regarder quand elle a été prononcée. C'est au moment de la célébration de la Pâque, Jésus sait déjà qu'il va bientôt mourir : "Je ne suis plus pour très longtemps avec vous". C'est une sorte de testament, mais c'est surtout une consigne, un souhait. Pour en comprendre le fond et la portée, il faut faire un petit voyage dans l'évangile de saint Matthieu. À la fin de l'évangile, Jésus parle de sa mort imminente, mais aussi du jour où il reviendra dans la gloire, à la fin des temps. Et que faire pour les chrétiens durant cet intervalle ? Jésus prend trois paraboles.

- Celle du jugement dernier, où Jésus reprochera aux hommes de ne pas l'avoir soigné, ni visité, ni accueilli. Et les gens de s'en étonner : "Mais quand t'avons-nous vu avoir soif, être prisonnier, étranger sans nous être occupé de toi ?" et Jésus de répondre : "Tout ce que vous avez fait ou pas fait à l'un de ces petits, c'est à moi que vous l'avez fait ou pas fait".
- Celle des talents : les talents que chacun de nous doit faire fructifier c'est la charité.
- Celle des dix jeunes filles qui attendent l'arrivée de l'époux toute la nuit, l'huile qui remplit leur lampe c'est la charité. Celle-là même qui leur permettra d'entrer avec l'époux dans la salle de noce.

La ligne de conduite est claire : "Aimez-vous les uns les autres" ne signifie rien d'autre que rivaliser de charité envers les autres, jusqu'au moment du retour du Christ.
Exercer la charité est le devoir premier du chrétien en attendant le retour du Christ.

Vous me direz : "D'accord, on a bien compris qu'il fallait s'aimer les uns les autres, mais pourquoi Jésus dit-il : "Je vous donne un commandement" ?

- Bien sûr Jésus reprend un texte de l'Ancien Testament, le livre des Lévites (Lv 19, 18) où Dieu donne à Moïse un certain nombre de lois pour le peuple, qui commence d'ailleurs par ces mots significatifs : "Soyez saints car je suis saint". L'homme a besoin de lois pour vivre, besoin de commandements ou règle de vie. S'il n'y a pas de règles, il ne peut y avoir de vie sociale. Mais peut-être et surtout pas de véritable personnalité.
Saint Paul dit : "La loi est un pédagogue." Elle peut nous conduire au Christ qui devient alors notre pédagogue.

Ceux qui refusent la loi, ceux qui refusent de se donner à eux-mêmes des lois, c'est-à-dire une règle de vie, se condamnent à l'anarchie et y condamnent par le fait même tous ceux qui les entourent.

Mais pour comprendre le véritable sens du mot commandement, il faut y ajouter l'adjectif que Jésus à lui-même ajouté : "un commandement nouveau". Pourquoi nouveau ? On en a beaucoup discuté.

- Nouveau parce que les rabbins ne parlaient que de pratiques du temple, ceux-là même dont Jésus dit : "Ils disent et ne font pas" qui sont en contradiction entre leur parole et leur comportement.
- Nouveau parce que saint Paul dit : "Si je n'ai pas la charité je ne suis rien". Dans l'échange entre le 'Je" et le "Tu", l'homme confirme sa nature, mais aussi il se dépasse. Le dépassement, provoqué par la charité, en fait un homme nouveau.
- Nouveau parce qu'on avait oublié le Livre des lévites ?
- Nouveau surtout parce que : "Comme je vous ai aimés".
- Un chrétien aime parce qu’il se sait aimé de Dieu. J'aime parce que je suis aimé, que de mal à aimer quand on n'a jamais été aimé !
- Nouveau parce que Jésus met l'homme devant un dilemme : tout se joue pour le chrétien sur l'observation ou la non observation de l'amour.
Tant il est vrai qu'à côté de l'amour il ne reste qu'une possibilité : la haine du frère, l'homicide, le meurtre. "Qui hait son frère est un meurtrier."