Homélie - TO 17 — Abbaye de Tamié

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Abbaye de Tamié
Navigation

Homélie - TO 17

Par Frère Raffaële
croix - arcabas

17ème dimanche du temps ordinaire

 


 Homélie

Frères et soeurs, il y a des pages d'évangile qui ont comme une fraîcheur et un parfum de printemps, des pages qui respirent la joie d'une découverte toute neuve, pleine de promesses. Telles sont ces paraboles du Royaume que nous venons de lire, avec leurs images suggestives : le regard émerveillé du laboureur face au trésor à peine découvert, les yeux éblouis du négociant devant la perle aux mille feux.

Mais qu'est-ce que ce mystérieux Royaume des cieux que Jésus compare à un trésor enfoui ou à une perle précieuse ? Le Royaume des cieux, c'est une expression qui revient souvent dans l'évangile de S. Matthieu. En bon juif familier des saintes Écritures, Matthieu sait bien que Celui qui est aux cieux, le Seigneur, règne sur le monde. Mais ce fils d'Israël, ce scribe qui tire de son trésor du neuf et de l'ancien, a une bonne nouvelle à nous annoncer, une découverte saisissante qu'il a faite et qui a changé sa vie : ce Royaume céleste s'est fait tout proche des hommes dans la personne de Jésus. Désormais, le Royaume est là, au milieu de nous ; il est présent en Jésus, dans sa Parole, dans ses gestes de guérison et de salut. C'est Jésus qui est-le trésor caché, la perle de grand prix qui s'offrent à nous et se laissent trouver par ceux qui les cherchent.

Un petit livre qui a nourri la foi et la prière des chrétiens pendant des siècles, l'Imitation de Jésus-Christ, nous dit cela de façon percutante : « Qui trouve Jésus trouve un trésor immense, ou plutôt un bien au-dessus de tout bien... Vivre sans Jésus, c'est le comble de l'indigence ; être uni à Jésus, c'est posséder des richesses infinies... Quand Jésus est présent, tout est doux et rien ne semble difficile ; mais quand Jésus se retire, tout fatigue. » (II, VIII, 1-2)

Oui, c'est cela le trésor caché, la perle précieuse : connaître l'amour du Christ qui surpasse toute connaissance, comme S. Paul l'écrivait aux Éphésiens (3, 19).

Il se peut, frères et soeurs, que nous ayons parfois le sentiment de piétiner dans notre vie de foi. Et cela, malgré notre bonne volonté, nos efforts, nos engagements. Nous avons l'impression que notre prière est aride, nos eucharisties routinières ; les commandements de Dieu nous pèsent comme un fardeau. Eh bien, s'il nous faut ainsi tourner en rond, parfois longtemps, c'est parce qu'il ne nous a pas encore été donné de découvrir le trésor caché. Le trésor du Royaume sommeille encore, bien enfoui dans le champ de notre coeur. Et si nous ne l'avons pas encore découvert, c'est peut-être justement parce que nous sommes trop préoccupés de nous-mêmes, de notre fidélité, de nos efforts, de nos projets et de nos engagements, quelque généreux et dévoués qu'ils soient. Comme dit le vieux proverbe, n'est-ce pas là mettre la charrue avant les boeufs ? Car la foi n'est pas d'abord action, pratique, choses à faire, commandements à observer. La foi est d'abord rencontre et accueil. Elle est réponse à un amour qui nous précède toujours et qui s'offre à notre désir. Elle est découverte d'un amour qui nous a choisis et appelés de toute éternité. S. Paul nous le disait dans la deuxième lecture : « Ceux que Dieu connaissait par avance, il les a aussi destinés à être l'image de son Fils, pour faire de ce Fils l'aîné d'une multitude de frères. »

Si cette foi habite notre coeur, alors peu à peu nous sentons qu'une attitude nouvelle inspire nos gestes, une façon nouvelle d'envisager la vie, de nous conduire à l'égard de Dieu. Cette attitude est celle d'un fils. Spontanément, nous vivons dans la confiance et l'abandon vis-à-vis de Dieu, accueillant son amour et le lui retournant. Alors oui, nous avons découvert le trésor caché dans le champ. Et le signe incontestable de cette découverte, c'est la joie. C'est cette joie qui nous permet de vivre notre fidélité quotidienne à l'évangile non plus comme un poids, un carcan, mais comme une liberté, une libre réponse d'amour à l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ.

Et si nous n'avons pas encore découvert le trésor caché dans le champ, la perle de grand prix ? Eh bien, il nous faut demander cette grâce dans la prière. « J'ai entendu parler de toi, Seigneur, mais je ne te connais que par ouï-dire, comme Job avant ses épreuves (Job 42,5). Aide-moi à te découvrir. Laisse jaillir dans le silence de mon coeur, telle une brise légère, ta voix discrète et si longtemps attendue. Je t'attends. Trop longtemps, tu t'es laissé désirer. Je t'attends, puisque je t'aime déjà sans te connaître. Fais briller sur moi la lumière de ta face. » Et nous entendrons sûrement un jour le Christ nous répondre, comme à Pascal : «Tu ne me chercherais pas, si tu ne m'avais trouvé. »