Chronique de Mars — Abbaye de Tamié

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Abbaye de Tamié

Chronique de Mars

Abbaye de Tamié

Chronique de Tamié - Mars 2006



Mercredi 1 : Entrée en carême. Fr. Nathanaël est au Salon de l’Agriculture qui ferme dimanche. Fr. Patrice l’a rejoint pour l’aider 3 jours. L’ambiance est morose : 10-20% de visiteurs en moins !

Jeudi 2 : Chapitre de P. Abbé - Un des buts du carême est de nous déstabiliser, pour nous permettre de découvrir Dieu, ses exigences. Le repas ensemble crée une communion, le jeûne aussi, pour une même recherche de Dieu, l’écoute de sa Parole.
Jean-Marie Petitclerc, prêtre salésien, nous donne une conférence sur le suicide des jeunes, le problème est important. Les adolescents ont besoin d’être aidés pour bien traverser cette étape de leur vie : il faut leur permettre de faire le deuil de leur enfance avec son impression de toute puissance, d’adultes idéalisés, d’image de soi rêvée ; à partir de leurs réalisations mêmes modestes, leur faire découvrir leurs richesses intérieures pour s’accepter soi-même et accepter les autres.

Vendredi 3 : Chapitre de P. Abbé - Dieu se cherche et se trouve en communauté. La qualité des relations est plus importante que leur quantité, sentir les aspirations de l’autre.

Samedi 4 : Le soir, Jacques, prêtre, et Jacqueline, laïque, de Nantes nous parlent de l’accompagnement des personnes en fin de vie ; ils forment des responsables d’aumônerie, selon les pistes de Carl Rogers. Il faut laisser les personnes prendre toutes les décisions qu’elles peuvent, s’abstenir d’une relation dominant-dominé. Être âgé n’est pas une maladie, c’est une étape de la vie qui peut être très enrichissante sur le plan humain. La personne âgée n’a pas conscience d’être vieille, elle en prend conscience seulement dans le regard de l’autre. Il est souvent difficile d’intégrer cette nouvelle image de soi.

Dimanche 5 : Chapitre de Père Abbé - L’autorité dans l’Église est un don de Dieu pour le salut. Jésus donne l’exemple d’une autorité de service. Il a transmis son autorité à ses disciples mais il reste présent dans son Église. Les décisions sont à prendre en référence à Lui. L’autorité fondamentale demeure l’Écriture, mais il faut l’interpréter, les médiations humaines sont nécessaires. L’autorité est au service de la communion qui n’est pas uniformité.
L’après-midi, film de Silène Lang : Frère Luc moine de Tibhirine - Jusqu’au bout de l’espérance. « Le don de toute une vie ne s’est pas improvisé au gré des derniers événements, mais était déjà commencé bien avant. »

Mardi 7 : Par leur hospitalité empressée les moines partagent la paix et l’espérance que donne le Christ avec ceux qui comme eux, sont en marche.
Mgr Giuseppe, évêque d’Aoste, est en retraite ici avec une douzaine de prêtres. Il nous présente son diocèse : dans une petite Région autonome, tout le monde se connaît et l’administration est très présente ; très grande proportion de divorces ; le tourisme est important et géré par les entreprises familiales avec peu de collaboration ; les enfants sont souvent laissés à eux-mêmes ; la vitalité religieuse existe, il faut l’aider à se développer, faire confiance. L’évêque, dans son séminaire vide, a proposé à des jeunes de venir y passer un temps, non pour faire de l’extraordinaire mais pour vivre tout simplement ensemble : prière, réflexion, travaux, repas… Les participants ont apprécié cette expérience d’une vie commune qu’ils ne connaissent pas dans leur famille souvent réduite à un enfant unique.

Dimanche 12 : Dom Patrick est parmi nous durant quelques jours, entre deux visites régulières. * La précarité est réelle pour un nombre important de communautés de l'Ordre et des actions sont mises en œuvre. Il n’y a pas de situations perdues tant qu’on ne l’a pas décidé. Il existe dans les personnes des possibilités réelles et parfois cachées qu’il faut solliciter, des capacités pour trouver en soi des aptitudes au changement, c’est un motif d’espérance. Les événements peuvent permettre de révéler les richesses de chacun. * Le travail manuel : comment éviter que le travail devienne une réalité indépendante de la personne et de la communauté ? Comment réorganiser le travail communautaire ? Les frères convers avaient réalisé un type d’intégration du travail qui était valable à une certaine époque. Aujourd’hui la réalité rend l’équilibre plus difficile à trouver.
L’après-midi un film du réalisateur américain Terry George concernant le génocide en 1994 : Hôtel Rwanda,. A partir d’un fait réel : Paul Rusesabagina directeur de l'Hôtel des Mille Collines est hutu, sa femme est tutsie ; lorsque les massacres débutent, Paul se trouve impliqué dans la défense des Tutsis afin de protéger sa famille mais aussi ses voisins et plus d'un millier de personnes qui trouvent refuge dans l’hôtel. Malgré les risques, la peur, il parvient à en sauver un grand nombre, avec la collaboration du personnel et de ceux et celles qui n'ont pas renoncé. Les puissances occidentales avaient abandonné ce peuple en ne soutenant pas la Minuar, le contingent de l'ONU.

Mardi 14 : Le matin, dom Patrick nous livre quelques réflexions sur la vie de la communauté.
* Une communauté est quelque chose qui doit vivre, non pas de l’extérieur, mais par la conviction de chacun qui se sent responsable de la communauté à son niveau. Nous sommes tous des joueurs et non des supporters.
* Savoir où nous allons et regarder si nous en prenons les moyens, rester attentif au cap que nous donnons à notre propre existence ; il y a le risque de se disperser intérieurement. Le seul fait que des personnes vivent ensemble et sous le même toit ne suffit pas pour créer une communauté.
* Le support mutuel demande une part d’abandon par chacun, de savoir quitter ses manières de voir, de modifier ses habitudes.
* Ce qui permet à la communauté d’avancer c’est l’espérance ; un obstacle est là pour permettre à chacun de donner le meilleur de lui-même. Cultiver l’espérance. Une communauté est vivante non par le nombre de frères, de novices, mais par l’espérance de chacun. Est-ce que je suis moteur d’espérance dans la vie de la communauté ? Le demander au Seigneur.

Mercredi 15 : L’apostolat des moines - Notre fidélité à la vie monastique, notre zèle pour le royaume de Dieu et le salut de toute l'humanité sont intimement liés. Notre façon de participer à la mission du Christ et de son Eglise, ainsi que de s'insérer dans une Eglise locale, est notre vie contemplative elle-même, aussi les moines ne participent pas directement à l’apostolat en paroisse.

Jeudi 16 : Le lien avec la hiérarchie de l’Église - Redécouvrir la valeur de la communion nous oblige à développer cette communion avec l’Eglise locale et l’Eglise universelle. Qui dit amour, dit obéissance.
Dimanche 19 : Communier dans la différence ; mieux nous connaître pour mieux nous aimer. Dieu nous a créés différents pour que nous puissions refléter les différentes facettes de son visage. Un consensus différencié n’est pas un compromis ; le compromis nécessite l’abandon d’une partie de ses exigences; dans le consensus différencié on accepte une certaine divergence en s’appuyant sur des points fondamentaux de la foi commune.
L’après-midi film de Mel Gibson : La Passion du Christ. Sa sortie en 2004 provoqua un scandale qui s’est peu à peu atténué. Des scènes très dures alternent avec d’autres de douceur par la présence de femmes. Pour saisir les allusions nombreuses il faut une bonne connaissance des évangiles.
Mardi 21 : L’autorité est un sujet délicat et difficile pour tous. Le journal La Croix lance une enquête : Faut-il la restaurer ou la réinventer ? L’Abbé reçoit son pouvoir de Dieu par le ministère de l’Église.

Mercredi 22 : L’autorité interroge notre foi : l’Abbé tient la place du Christ, il ne le remplace pas, mais c’est le Christ qui gouverne la communauté par l’intermédiaire de l’Abbé. Le Christ est lui-même le Père de la communauté, chacun de nous est présence du Christ et doit refléter un aspect du Christ.

Jeudi 23 : L’aspect juridique du Droit Canon ne doit pas faire oublier certaines nouveautés directement issues du Concile : le ton plus pastoral, l'insistance sur l'esprit de service qui doit animer les Supérieurs, sur leur devoir de susciter la coopération des membres de la communauté, tout en gardant la décision finale, sur leur responsabilité dans la construction d’une communauté fraternelle.

Vendredi 24 : L’Abbé est médecin pour lui et pour les autres. La grâce arrive à travers la médiation de l’Église, de l’Abbé, des sacrements, des Frères. La prière des Frères nous porte et nous guérit.
A 15 h, à l’église, rencontre avec John Kiser auteur de Les Moines de Tibhirine, Passion pour l’Algérie et le traducteur Henry Quinson. Emmanuel Audrain nous présente son film : « Le testament de Tibhirine » message de vie et de fraternité universelle. Colette, sœur de Fr. Paul et Annick, sa nièce mariée à un algérien, donnent leur témoignage sur ce que représente pour elles la mort des 7 moines.

Mercredi 29 : L’Abbé se choisit des aides, des coadjuteurs, il délègue sa charge par subsidiarité. Tout le monde est responsable dans son secteur. La confiance doit régner entre les officiers et l’Abbé.

Jeudi 30 : L’Abbé doit consulter les Frères. C’est un nouveau visage de l’obéissance et de l’exercice de l’autorité. Ce type de dialogue figurait déjà dans la Règle de st Benoît. Le dialogue communautaire a une valeur particulière, la position de chacun peut évoluer dans l’échange, pour être à l’écoute de l’Esprit Saint et discerner la volonté de Dieu. Il faut une grande ouverture aux autres, donner son avis avec humilité, en acceptant que les autres puissent avoir un meilleur point de vue, plus d’informations.

Vendredi 31 : Dans les échanges, parvenir à susciter un climat de confiance permet de vivre une vraie communion. Quand on discute en communauté, il y a quelque chose qui se vit, dans la confiance, en vue d’une communion.
Au cours de ce mois de mars nous avons inauguré une nouvelle façon de chanter les Psaumes des Montées pour les Petites Heures. L’abbé Henri Dumas nous a composé six mélodies adaptées chacune à un ou deux psaumes particuliers. Ce n’est plus la façon habituelle de psalmodier mais une façon plus proche de l’hymne qui épouse bien le texte de ces psaumes de pèlerinage. En les chantant ainsi, on éprouve vraiment une impression de marche. Très vite la communauté s’est familiarisée avec quatre de ces mélodies, quitte à répéter tous les jours les mêmes psaumes à Tierce et à None.