Homélie - TO 32 — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie - TO 32

Par Frère Marco
croix - arcabas
Homélie pour le 32ème dimanche
du temps ordinaire

1ère lecture : Sept frères meurent martyrs dans l’espérance de la résurrection (2 M 7, 1-2.9-14)

Lecture du second livre des Martyrs d’Israël

Sept frères avaient été arrêtés avec leur mère. A coups de fouet et de nerf de boeuf, le roi Antiochus voulut les contraindre à manger du porc, viande interdite.
L’un d’eux déclara au nom de tous : « Que cherches-tu à savoir de nous ? Nous sommes prêts à mourir plutôt que de transgresser les lois de nos pères. »
Le deuxième frère lui dit, au moment de rendre le dernier soupir : « Tu es un scélérat, toi qui nous arraches à cette vie présente, mais puisque nous mourons par fidélité à ses lois, le Roi du monde nous ressuscitera pour une vie éternelle. »

Après celui-là, le troisième fut mis à la torture. Il tendit la langue aussitôt qu’on le lui ordonna, et il présenta les mains avec intrépidité, en déclarant avec noblesse : « C’est du Ciel que je tiens ces membres, mais à cause de sa Loi je les méprise, et c’est par lui que j’espère les retrouver. » Le roi et sa suite furent frappés du courage de ce jeune homme qui comptait pour rien les souffrances. Lorsque celui-ci fut mort, le quatrième frère fut soumis aux mêmes tortures. Sur le point d’expirer, il parla ainsi : « Mieux vaut mourir par la main des hommes, quand on attend la résurrection promise par Dieu, tandis que toi, tu ne connaîtras pas la résurrection pour la vie éternelle. »

 

Psaume : Ps 16, 1.3ab, 5-6, 8.15

R/ Le jour viendra, Seigneur, où je m’éveillerai en ta présence

Seigneur, écoute la justice !
Entends ma plainte, accueille ma prière.
Tu sondes mon cœur, tu me visites la nuit,
tu m’éprouves, sans rien trouver.

J’ai tenu mes pas sur tes traces,
jamais mon pied n’a trébuché.
Je t’appelle, toi, le Dieu qui répond :
écoute-moi, entends ce que je dis.

Garde-moi comme la prunelle de l’œil ;
à l’ombre de tes ailes, cache-moi.
Et moi, par ta justice, je verrai ta face :
au réveil, je me rassasierai de ton visage.


2ème lecture : Exhortation à la persévérance (2 Th 2, 16-17; 3, 1-5)

Lecture de la seconde lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens

Frères, laissez-vous réconforter par notre Seigneur Jésus Christ lui-même et par Dieu notre Père, lui qui nous a aimés et qui, dans sa grâce, nous a pour toujours donné réconfort et joyeuse espérance ; qu’ils affermissent votre coeur dans tout ce que vous pouvez faire et dire de bien. Priez aussi pour nous, frères, afin que la parole du Seigneur poursuive sa course, et qu’on lui rende gloire partout comme chez vous. Priez pour que nous échappions à la méchanceté des gens qui nous veulent du mal, car tout le monde n’a pas la foi. Le Seigneur, lui, est fidèle : il vous affermira et vous protégera du Mal. Et, dans le Seigneur, nous avons pleine confiance en vous : vous faites et vous continuerez à faire ce que nous vous ordonnons.
Que le Seigneur vous conduise à l’amour de Dieu et à la persévérance pour attendre le Christ.

 

Évangile : Les morts ressusciteront (Lc 20, 27-38)

Acclamation : Alléluia. Alléluia. Jésus Christ, premier-né d’entre les morts, à toi gloire et puissance pour les siècles. Alléluia. (cf. Ap 1, 5-6)

Évangile de Jésus Christ selon saint Luc

Des sadducéens - ceux qui prétendent qu’il n’y a pas de résurrection - vinrent trouver Jésus, et ils l’interrogèrent : « Maître, Moïse nous a donné cette loi : Si un homme a un frère marié mais qui meurt sans enfant, qu’il épouse la veuve pour donner une descendance à son frère. Or, il y avait sept frères : le premier se maria et mourut sans enfant ; le deuxième, puis le troisième épousèrent la veuve, et ainsi tous les sept : ils moururent sans laisser d’enfants. Finalement la femme mourut aussi. Eh bien, à la résurrection, cette femme, de qui sera-t-elle l’épouse, puisque les sept l’ont eue pour femme ? »

Jésus répond : « Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts ne se marient pas, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection.
Quant à dire que les morts doivent ressusciter, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent, quand il appelle le Seigneur : ‘le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob’.
Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ; tous vivent en effet pour lui. »

 © AELF

Homélie

        L’évangile que nous venons d’entendre est d’une grande actualité, car bien des gens s'interrogent aujourd'hui sur l'au-delà...

Notre vie s'achève-t-elle avec la mort ? Qu’arrive-il à ceux qui nous ont déjà précédés dans l’au-delà ? Nous reverrons- nous ?  Que pouvons-nous espérer ?

 En réponse à la question piège des Sadducéens sur la femme aux sept maris, Jésus réaffirme avant tout le fait de la résurrection, et il corrige en même temps la représentation trop matérialiste et caricaturale qu’en font les Sadducéens, qui ne croient pas à la résurrection.

La conviction de Jésus repose sur l'Écriture et sa foi en la puissance de Dieu. C’est là encore aujourd'hui le cœur de l'espérance chrétienne : notre foi en la résurrection est d'abord foi au Dieu d'Abraham, le Dieu des vivants, dont la puissance d'Amour est si grande qu'il ne nous abandonnera pas à la mort.

Comme le dit le psalmiste : «...Tu ne peux pas m’abandonner à la mort, ni laisser ton ami voir la corruption » (Ps 16,10)

       Mais comment cela se fera-t-il ? Comment imaginer la vie après la mort? C'est à cette question que Jésus répond :

« Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d'avoir part au monde à venir et à la résurrection d'entre les morts ne se marient pas, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection. »

       Justement ce sera du neuf, ce sera une vie nouvelle, car la vie après la mort n’est pas un simple prolongement de la vie terrestre, elle n’est pas une simple survie. Non, ce sera autre chose, une condition nouvelle une vie qui va durer (comme les anges, nous serons immortels), une vie avec Dieu qui nous donnera en héritage (fils de Dieu) sa vie elle-même, et aussi la vie avec les autres, où la relation avec les autre sera totalement transfigurée.

       C’est vrai, nous ne pouvons pas imaginer ce que nous vivrons dans l’au-delà, nous ne pouvons pas imaginer ce que vivent ceux qui nous ont déjà précédés...C’est un peu comme la chenille qui ne peut pas imaginer ce qu’elle vivra en tant que papillon.

       L’Evangile n'abonde pas en détails sur l'au-delà. La sobriété y est plutôt de mise. Et cela même est une invitation à ne pas nous perdre dans une recherche anxieuse de précisions inaccessibles. La foi en la résurrection a sa racine profonde en Dieu, le Dieu de Jésus, le Miséricordieux, qui promet une vie sans fin à tout notre être.

       « Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d'avoir part au monde à venir et à la résurrection d'entre les morts ne se marient pas, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection. »

       A partir de cette parole de Jésus certains pensent que le mariage n’a aucune suite au ciel.

« Est-il possible que deux époux, après une vie qui les a associés à Dieu dans le miracle de la création, n’aient plus rien en commun dans la vie éternelle, comme si tout avait été oublié, perdu ? Cela ne serait-il pas en opposition avec la parole de Jésus qui dit que l’on ne doit pas séparer ce que Dieu a uni ? Si Dieu les a unis sur la terre, comment pourrait-il les séparer au ciel ?» (P.R. Cantalamessa)

       Dans la lettre aux Ephésiens (5,32) l’apôtre Paul parle du mariage comme du « sacrement » qui symbolise l’union entre le Christ et l’Eglise. Est-il donc possible que cela soit annulé précisément dans la Jérusalem céleste, où l’on célèbre l’éternel banquet de noces entre le Christ et l’Eglise, dont le mariage est l’image ?

« Selon cette vision, le mariage ne se termine pas avec la mort, mais il est transfiguré. On lui enlève toutes les limites qui caractérisent la vie sur la terre.»

       Si cela est vrai pour le mariage, cela est aussi vrai pour toutes les autres relations : la relation « entre parents et enfants, ou entre amis, ou entre frères et sœurs d’une même famille... ou entre les frères d’une communauté monastique...

       Je ne peux pas m’empêcher de penser à ce que Thésée de Lisieux dit juste avant de mourir : « Je ne meure pas j’entre dans la vie » A la lumière de tout l’Évangile, nous sommes invités à parler de la mort comme d’une entrée dans la vie véritable.

       Nous sommes aussi invités à parler de la vie après la mort en termes de relation et d’amour.

       L’essentiel de notre vie, ce sont les relations que nous tissons. Rien de ces relations ne sera perdu. « La mort n’est pas le néant, ni la fin de toute relation : elle est le passage, « le pas d’amour » qui épanouira transfigurera tout ce qu’il y a déjà d’amour dans notre vie.

       Je voudrais terminer par un beau témoignage : celui d’une femme chirurgienne qui s’est illustrée il y a quelques années en parvenant à recoudre le bras arraché d’un jeune garçon. Elle-même a perdu brutalement un enfant à l’âge de 5 mois. A quelqu’un qui lui demandait : « Pourquoi, dans votre curriculum vitæ, écrivez-vous que vous avez 5 enfants ? Et vous donnez toujours le nom de Martin qui est mort à 5 mois ». Et la maman de répondre : « Mais Martin existe toujours il est vivant ! On m’a suggéré plusieurs fois de donner ce nom de Martin aux garçons qui sont nés après lui. J’ai toujours refusé parce que Martin existe ! » .

       Oui, Dieu, n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants ; car tous vivent pour lui. »

(Homélie d’après différentes sources)