Homélie - 31ème dimanche — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie - 31ème dimanche

Par Frère Didier
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Homélie pour le 30ème
dimanche ordinaire

LUC 19, 1-10
Zachée ! Il faut que j'aille loger chez toi !

Chers frères et sœurs, vous connaissez bien cet évangile… Autrefois, ou récemment, vous avez peut-être dessiné, au catéchisme, ce petit  bonhomme de Zachée grimpé dans son arbre…

Il me semble aujourd’hui qu’il faudrait le jouer, cet évangile,… pour en goûter à nouveau la force et le charme,… pour nous laisser surprendre  à nouveau par les multiples surprises qui jaillissent phrase après phrase…Il nous faudrait courir…et grimper… et regarder de là haut…et  redescendre à toute vitesse…et peut-être prendre Jésus par la main pour l’emmener chez nous… afin d’éprouver, et en quelque sorte inscrire dans notre corps tout ce qui se passe,… chacun de ces moments qui s’enchaînent rapidement et qui ont chacun quelque chose à nous dire,… chacun de ces moment qui ont tous quelque chose d’inattendu,… qui sont des surprises.

N’est-ce pas surprenant de voir ce petit bonhomme se mettre à courir et à grimper sur un arbre… Car vous savez, les petits messieurs comme ça, en cravate et complet veston,  - affaires obligent – ce n’est pas l’habitude de les voir grimper sur les arbres… Étonnant, surprenant !
Première surprise.

La deuxième surprise :
C’est plus une surprise pour Zachée que pour nous…qui connaissons déjà Jésus…Surprise de voir Jésus lever les yeux vers lui, le regarder… et surprise de l’entendre l’appeler par son nom : « Zachée…. ! »

 Quoi ! Il m’a repéré dans mon arbre !...Quoi ! Il connaît mon nom !... Il sait que c’est moi !... Il voit tout, ce Jésus,… il sait tout, ce Jésus… Et c’est comme si… il me cherchait avant même que moi je me mette à le chercher…Est-ce que c’est possible, ça, que bien avant que je désire le voir, ce Jésus, LUI, il désirait me rencontrer !...
Peut-être depuis toujours…
Et peut-être pour toujours…

Et puis, c’est pas croyable, il ne veut pas seulement me rencontrer, il veut venir loger chez moi !... Et puis d’ailleurs ce n’est pas « il veut », c’est « il faut » !... Oui, j’ai bien entendu : « Aujourd’hui, il faut que j’aille demeurer chez toi. »… Hou-la-la ! Mais qu’est-ce qui se passe ?

Hé bien, frères et sœurs, c’est là que Zachée me surprend le plus : la simplicité de sa réaction !... « Vite, il descend et reçoit Jésus avec joie »… Et je me demande même si cette spontanéité et cette joie n’ont pas été une surprise pour Jésus lui-même !... En tout cas, c’est une immense joie pour Jésus !... Parions pour une double surprise et une double joie !... et demeurons un instant attentifs à cette rencontre des joies, un instant de reconnaissance que je veux offrir à notre cher frère Anthelme qui aimait tellement nous parler de cette double joie :
- La joie-que-Dieu-nous-donne et la joie-que-nous-donnons-à-Dieu,
- La joie qu’est Dieu pour nous et la joie que nous sommes pour Dieu !

Et puis il y a une surprise pour les gens qui sont là,… qui sont déconcertés, même scandalisés de voir Jésus chez Zachée:

« Voyez-vous ça ! Il est allé loger chez un pécheur ! »
Comme si on n’était pas tous pécheur !

Et il y en a encore d’autres, des surprises : la surprise pour tous de voir Zachée donner la moitié de ses biens aux pauvres, et cette excellente surprise, pour tous ceux qu’il avait floués, de recevoir quatre fois plus !

Mais la plus belle des surprises, n’est-ce pas celle de l’aujourd’hui, celle des deux « aujourd’hui » que prononce Jésus :
 « Aujourd’hui, il faut que j’aille demeurer chez toi . »
 « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison. »

Un aujourd’hui pour Zachée, mais aussi un aujourd’hui pour nous...
La Bonne Nouvelle que notre Dieu est Toute Miséricorde
et qu’il est là, présent, Dieu-avec-nous, Dieu-en-nous,
pour nous faire vivre d’une vie nouvelle
dans tous nos aujourd’hui.

 La Bonne Nouvelle que tous nos aujourd’hui, que tous nos maintenant,  sont pleins du Don de la Miséricorde Infinie et de la Présence bousculante certes, transformante, mais tellement aimante de Jésus.

Ainsi cet Evangile nous fait avancer de surprise en surprise et d’émerveillement en émerveillement…Et la Présence de Jésus dont on n’a jamais fini de découvrir l’infini de l’Amour, devrait toujours être pour nous une « surprise émerveillée », comme j’ai eu la joie de le lire dans une lettre d’amitié :

« Mon Seigneur, ma surprise émerveillée,
je t’aime comme une Naissance,
comme la Force d’un Bonheur
toujours à découvrir… »

Nous voici donc invités à l’action de grâce pour le Don de la Miséricorde, invités à laisser s’épanouir en nous le chant intérieur, une sorte d’état de chant…et invités aussi à approfondir notre recueillement pour bien accueillir la Présence de Jésus.

Oui, nous devons un immense merci à Dieu, simplement pour ce qu’il est : la miséricorde !

Oui, Jésus est assis à la table des pécheurs, et nul n’est exclu de son amitié, de sa tendresse…Si nous nous voyons misérables, dégradés, nous pouvons être sûrs de son Amour pour nous, car sa Miséricorde précède notre misère, et il vient aussitôt « chercher et sauver ce qui était perdu. »

Il suffit de consentir au Don de sa Miséricorde…
mais il le faut, mais il l’attend de nous,
ce libre et joyeux  consentement.

 Et puis nous devons lui offrir notre silence, notre silence de recueillement…pour l’entendre frapper tout doucement à la porte de notre cœur : « Voici, je me tiens à la porte, et je frappe.

Si tu entends ma voix et m’ouvres la porte, j’entrerai chez toi, je prendrai mon repas avec toi… et toi avec moi ! » (Apocalypse)
Ah ! Jésus en nous !

Il est là présent…mais avons-nous vraiment consenti au Don de sa Présence ?... D’accord, il est là,… mais avons-nous consenti à sa Présence jusqu’à l’envahissement,… jusqu’à être envahi par sa Présence ?...

Lui avons-nous donné notre libre et joyeux consentement ?

La preuve, ce sera comme pour Zachée, ce don de nous-mêmes aux autres, ma vie transformée : je n’accapare plus les autres à mon profit
mais je me mets à vivre pour la joie des autres…

Le vrai recueillement me fait percevoir la Présence de l’Autre, cet Autre qui est Jésus en moi,…mais aussi la Présence de tous les autres…Le vrai recueillement dans l’intimité de l’Autre devient la source de l’immense accueil de tous les autres…

Le libre et joyeux consentement à la présence de ce Frère et Ami en moi m’engage dans ma vocation de frère et d’ami

L’envahissement de la Présence de Jésus devient l’envahissement d’une multitude !

En vérité, « consentir, c’est être sauvé ! »       (St Bernard)

Consentir, c’est répondre à notre vocation eucharistique : accueillir avec joie le Don de Dieu, Dieu lui-même qui se donne, et chacun de nos frères comme Don de Dieu, et nous offrir à Dieu, et nous offrir les uns aux autres pour la joie de Dieu.

C’est hâter le Jour de la Communion, de l’éternelle Communion où nous serons les uns pour les autres,
comme Dieu l’est pour chacun de nous,
et comme nous le serons pour Dieu,
une source incomparable de joie…

C’est déjà tout cela que nous commençons à vivre dans l’aujourd’hui de ce jour de grâce,… particulièrement dans le maintenant de cette Eucharistie.
Mais c’est à chaque instant de nos vies que nous sommes appelés à donner notre consentement…

Personnellement, j’aime à redire, en prière intérieure, ces mots de la Bible :A
AMEN ! AMEN !    MARANA THA !    ALLÉLUIA !

- Ce « Oui » de l’AMEN,
- Ce « Viens Seigneur ! - Oui, viens demeurer chez moi comme tu es venu demeurer chez Zachée ! »
- Et cet Alléluia ! de louange pour tant de grâces !