Homélie Pâques 2 — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie Pâques 2

Par Frère Gaël

Comme Jean dans la 2ème lecture de l'Apocalypse, je vous propose ce matin de nous laisser « saisir en esprit » et de contempler le passage d'Evangile que nous venons d'entendre. Je développerai deux points (citer les deux titres).

1. Reconnaitre Jésus ressuscité par la foi grâce aux sens spirituels

Contemplons. Trois jours après l'arrestation de Jésus qui les a dispersés, les Apôtres se retrouvent. Le matin, Jean, qui est allé au tombeau et a vu le linceul affaissé, a dit qu'il croyait fermement que Jésus était ressuscité. Puis est arrivée Marie-Madeleine, qui a affirmé avoir vu, entendu, touché le Seigneur ressuscité. Comment croire une femme aussi émotive ?... Les apôtres sont inquiets. Menace d'arrestation par les chefs religieux... et questionnement sans fin : Jésus est-il vraiment ressuscité ? Pourquoi ne se manifeste-t-il pas à eux, ceux qu'il a choisis comme fondement de son Eglise ? Pierre, en particulier, n'est pas fier de son reniement : quelles excuses présenter à Jésus ? Tous se mettent à prier les psaumes. Ils prient en particulier le Psaume 16, dont je disais ce Vendredi Saint qu'il avait accompagné Jésus à Gethsémani et pendant les interrogatoires des Juifs. Ce psaume de supplication proclame l'innocence d'une victime traquée, demande l'intervention divine pour la délivrer des agresseurs, enfin annonce la victoire de Dieu qui montrera son visage... Et c'est justement quand l'assemblée chante ces mots : « Et moi, par ta justice, je verrai ta face : au réveil, je me rassasierai de ton visage » (Ps 16,15), qu'elle les chantait avec une certaine émotion que, soudain apparait « au milieu d'eux » (v. 19) une personne supplémentaire, alors que portes et verrous sont soigneusement fermés ! Ce n'est pas Thomas, qui vient de partir faire les courses, mais quelqu'un qu'ils n'arrivent pas à identifier ; ou plutôt quelqu'un dont ils n'arrivent pas encore à croire à la présence, malgré la vision qu'il leur offre. Les entrailles se nouent, les souffles sont coupés. Alors s'ajoute le témoignage de l'ouïe : ils entendent sa voix, ils reconnaissent sa voix. Et son message qui ravive leur mémoire : « La paix soit avec vous ! » (v. 19) Ce n'est pas tout, pour dissiper tout équivoque — car un fantôme serait capable de tromper leur vue et leur ouïe —, il les invite à le toucher. Marie-Madeleine ne lui a-t-elle pas serré les pieds ce matin, et Thomas ne sera-t-il pas jaloux des disciples au point de vouloir mettre son doigt dans les traces laissées par les clous et sa main dans le coeur transpercé par la lance ? Plus de doute possible, c'est bien le Jésus qu'ils ont connu, qui a été crucifié, qui est ressuscité avec son corps ! Alléluia !!

Quand Jésus revient une semaine plus tard, c'est-à-dire aujourd'hui, il s'adresse à Thomas, figure ou « Jumeau » de tous les incroyants, et il relève le défi que son apôtre lui a adressé devant toute l'assemblée : il l'invite à le toucher, tout en rabaissant son orgueil par cette béatitude : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » (v. 29) Oui, heureux ceux qui croient le témoignage de leurs frères croyants. Pour nous aujourd'hui, heureux sommes nous si nous croyons le témoignage des Ecritures, en particulier le témoignage des Evangiles. A partir de ce témoignage, nous pouvons exercer nos sens spirituels : voir dans la foi ce que les disciples ont vu de leurs yeux, entendre dans l'Esprit Saint ce qu'ils ont entendu de leurs oreilles, toucher dans la foi ce qu'ils ont touché de leurs mains. En demandant l'aide de l'Esprit Saint, nous pouvons exercer nos 5 sens grâce à l'imagination, l'intelligence et la volonté. Alors la Parole de Dieu se fraie un chemin jusque dans nos coeurs et nous transforme. C'est ce que nous faisons ce matin en méditant l'Evangile, en contemplant la scène et les personnages. C'est une manière de faire lectio divina.

2. Accueillir la mission de la miséricorde

Nous continuons notre contemplation. Quand Jésus ressuscité dit à Thomas : « Avance ton doigt ici... avance ta main et mets-la dans mon côté » (v. 27), Thomas ne fera même pas le geste. Saisi de repentir, il se jette aux pieds de Jésus pour lui demander pardon. Et il demande pardon à tous ses frères qu'il a blessés en ne croyant pas leur témoignage. Puis, suivant l'exemple de Thomas, c'est au tour de Pierre de demander pardon au nom de tous à Jésus puis à Marie-Madeleine, de n'avoir pas cru à son témoignage. Ainsi commençait le ministère de la réconciliation, au sein de l'Eglise naissante, où tous n'auront qu' « un même coeur » (1ère lecture). Ainsi s'accomplissait la parole de Jésus au soir de Pâques à ses disciples : « Recevez l'Esprit Saint. A qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis. » (v. 22-23) Mais ce pardon n'est pas réservé aux membres de l'Eglise, il doit s'étendre à tous, car Jésus leur a dit : « De même que le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie. » (v. 21) Après la Pentecôte, en entendant Pierre et les autres apôtres, un grand nombre de Juifs demandera le baptême au nom de Jésus pour le pardon de leurs péchés (cf. Ac 2-4).

Frères et sœurs, nous aussi aujourd'hui sommes invités à témoigner autour de nous de notre foi en Jésus mort et ressuscité, même si on ne nous croit pas. A témoigner que Dieu fait grâce, qu'il pardonne nos péchés, qu'il fait miséricorde, même si ce mot agace. On m'a raconté que dans une paroisse d'Annecy, chaque semaine des équipes de fidèles annoncent la Bonne Nouvelle dans les rues de la ville ou chez l'habitant, et ceux et celles qui le font en sont les premiers bénéficiaires. Nous pouvons tous témoigner si nous nous efforçons chaque jour de mieux connaitre Jésus, par la foi en méditant les Evangiles, par la charité en vivant l'Evangile. Alors nous désirerons partager notre trésor : la miséricorde de Dieu manifestée en Jésus, son Fils toujours vivant parmi nous, en nous.

Amen ! Alléluia !