Homélie TO 33 — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie TO 33

Par Frère Raffaele

Dieu nous fait confiance. Voilà le message que la Parole de Dieu nous transmet aujourd'hui. Le Seigneur est le maitre de tout et il pourrait très bien se passer de notre collaboration. Il n'en a aucun besoin. Mais il se comporte à notre égard comme un époux et non comme un seigneur distant et tyrannique. L'éloge de la femme vaillante que nous avons entendu dans la première lecture évoque déjà cette relation intime et féconde : « Son mari peut lui faire confiance : il ne manquera pas de ressources. » (Pr 31, 11) L'image de Dieu qui nous est offerte par l'évangile est celle de quelqu'un qui sait compter sur les autres, qui fait confiance à la bonne volonté et aux capacités des autres. Cette confiance de Dieu vis-à-vis de nous se manifeste dans le fait qu'il sait s'éloigner de ses serviteurs : « Il leur confia ses biens...puis il partit », nous dit l'évangile. Dieu se comporte avec nous comme un vrai maitre, capable de donner à chacun sa part et puis de nous quitter ; il se comporte comme un époux tellement sûr de la fidélité et de la diligence de son épouse qu'il peut partir au loin en toute sérénité et assurance. La preuve de cette confiance que Dieu nous fait consiste en ceci : il sait se retirer, il n'est pas harcelant et assommant. Or, le temps de son absence est le temps où nous pouvons comprendre quelle image de Dieu habite notre cœur et anime nos actions. Sommes-nous comme cette femme dont le mari est loin, mais toujours présent à son cœur au point d'inspirer ses choix et de la soutenir dans son labeur quotidien ? Sommes-nous comme ces serviteurs que le maitre à laissés, avec une totale confiance, à leur responsabilité et à leur capacité d'entreprendre ? Ou bien sommes-nous comme ce serviteur mauvais qui avait une relation avec son maitre fondée sur la peur, une peur qui paralyse et le pousse à enterrer son talent, parce que la peur bloque l'amour ? Le serviteur mauvais se contente de rejeter sur le maitre la faute de sa propre négligence : « Je savais que tu es un homme dur... J'ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre. » Souvent nous comprenons mal cet évangile. Nous comprenons que Dieu est pareil à un maitre auquel nous avons des comptes à rendre. Bien au contraire, Dieu nous propose le bonheur, une vie intense. Le talent que chacun reçoit est la puissance d'humanité qui est en lui. Plus il la fera croitre, plus il répandra le bonheur autour de lui et dans sa propre existence. Le serviteur mauvais n'a pas compris que l'engagement à faire fructifier son talent aurait été à son propre bénéfice, non au bénéfice du maitre.

Dieu ne nous demande pas de faire de grandes choses, mais tout simplement de ne pas avoir peur de lui et de lui montrer par quelques signes, si minimes soient-ils, que nous avons confiance en lui. Notre cœur blessé ne parvient pas à croire, parfois, que quelqu'un puisse croire en nous, en nos capacités, au talent que nous avons reçu. Alors nous nous enterrons en choisissant la mort plutôt que la vie. Seigneur, ne nous abandonne pas, libère-nous des ténèbres de la peur, du manque de confiance qui défigure notre visage de fils, d'amis, de bien-aimés. Amen.