Homélie Toussaint — Abbaye de Tamié

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Abbaye de Tamié

Homélie Toussaint

Par dom Ginepro

Pouvons-nous célébrer la Toussaint sans tenir compte du contexte sociologique qui est le nôtre de cette fin d’année 2020 ?

La pandémie deuxième vague, plus insidieuse que jamais.
Le terrorisme qui, maintenant, entre même à l’intérieur de nos maisons.
Le découragement qui en découle et qui semble s’installer… partout.

Autour de nous, beaucoup de personnes… désorientées.      

         Face à ces constats, où en sommes-nous ? Comment faire face, comment réagir ?  

Au-delà des problèmes à court terme, la pandémie questionne, d’abord, les chrétiens que nous sommes à propos de notre place dans notre société et dans le monde ; elle nous interroge sur notre existence même. J’entends sur la place de l’homme et la place que nous donnons à Dieu dans notre vie. Car cette sonnette d’alarme (que nous vivons) se montre capable de questionner toute la planète. Si nous nous mobilisons uniquement pour trouver le vaccin qui nous tire de l’embarras, alors nous ne serons pas allés très loin. Et nous devons aller plus loin !

Cette parole nous fait réfléchir : « Ne craignez pas ceux qui peuvent tuer votre corps et rien d’autre... Craignez plutôt ceux qui peuvent tuer votre âme… » (Mt. 10, 25). « Votre âme ». C’est ce que nous dit l’Evangile, qui répond explicitement aussi, je crois, à l’autre menace à laquelle je faisais référence : celle du terrorisme.

Chrétiens, voilà la question qui nous est posée : où est-elle, aujourd’hui, notre âme ? C’est elle qui est en jeu aujourd’hui. Nos frères les Saints ont donné beaucoup d’importance à l’âme qui, avouons-le, ne semble plus tellement présente dans nos horizons, notre quotidien. Il est vrai que, parfois, nous en parlons, mais pour dire : … « l’âme d’un peuple » ; « l’âme d’une civilisation ». Cela signifie donc quelque chose, pour nous. Et notre âme à nous, alors ? Serait-ce seulement une entité abstraite, une question de vocabulaire ? Je ne crois pas.

Les Saints dont nous faisons mémoire faisaient beaucoup d’attention à ce qui fait notre identité et qu’ils nommaient : âme, ce qui fait de nous des êtres vivants en relation avec Dieu, le seul Vivant. Cette attention à leur âme les orientait vers des choix extrêmement courageux, ces choix qui restent encore des références pour nous, chrétiens d’aujourd’hui.

Sans cette attention, nous risquons de nous laisser entrainer et de nous perdre dans les tourbillons de l’émotivité, du sentiment, de l’apparence. C’est ainsi que les déclarations des démagogues peuvent se multiplier autour de nous : nous entendons parler d’honneur offensée, de libertés niées, de droit à la riposte. Ou, pire, de droit à la vengeance. Dans la cacophonie générale, j’ai même lu : « il nous faudrait une belle guerre ». Comme pour les gamins : il faut que nous puissions en découdre pour nous défouler, pour écraser l’adversaire.

Les Saints que nous fêtons aujourd’hui, dans leur variété, avec leurs témoignages bien concrets, l’exemple de leurs vies, viennent encore à notre secours : cette foule innombrable ne veut pas que nous perdions de vue les vrais objectifs de notre existence ; Face à ces constats, où en sommes-nous ?  Là où le sort de notre âme, de notre fonction vitale orientée vers Dieu, se joue, pour nous aussi et pour l’éternité.

*

Parmi les Saints, il y a, bien sûr, ceux du passé. Nous en connaissons et ils restent des lumières pour nous. Et, certainement, nous pouvons en reconnaître aussi de plus proches, ceux qui sont dans nos milieux de vie, ceux qui nous ont accompagnés ou qui accompagnent notre existence et que, parfois, nous avons du mal à bien reconnaître. Mais ils sont là, même au milieu des fanatismes et les catastrophes sanitaires. Ce sont nos amis et les amis de Dieu.

Ne les perdons pas de vue !

Quant à nous, quel est notre rôle en tant que chrétiens, aujourd’hui ? Nous devons surtout témoigner de l’Espérance que le Christ nous donne :

« Ne craignons pas ! ».